Walter S. Allward pratique son art à une époque où il n’y a encore que peu de sculpteurs au Canada. Son succès inspirera d’autres jeunes artistes, dont Emanuel Hahn, Frances Loring, Florence Wyle et Elizabeth Wyn Wood, qui contribueront de façon importante à l’art canadien. Allward crée de nombreux monuments de guerre – tel le Mémorial de Vimy à l’apogée de sa carrière –, qui revêtent à la fois une dimension morale et esthétique, et dont le style tranche non seulement avec celui de la génération précédente de sculpteurs mais également avec celui de ses pairs. Allward, cherchant à révéler la tragédie de la guerre, conçoit des monuments où les thèmes de la mémoire et de la rédemption sont explorés avec provocation.
La mémorialisation de la Première Guerre mondiale
L’histoire est traversée de guerres ravageuses que l’homme a représentées dans l’art et ainsi commémorées, mais aucun conflit n’a mobilisé plus d’artistes que la Première Guerre mondiale (1914-1918). La contribution d’artistes du Canada résulte principalement des efforts de William Maxwell Aitken, futur Lord Beaverbrook, qui élabore en novembre 1916 le premier programme officiel d’art de guerre du pays, le Fonds de souvenirs de guerre canadiens. Destiné à fournir un témoignage durable de l’effort de guerre tant au Canada qu’à l’étranger, ce Fonds emploie au total plus d’une centaine d’artistes, pour la plupart britanniques et canadiens. À la fin des hostilités, près de mille œuvres ont été créées par des artistes tels que Cyril Henry Barraud (1877-1965), John William Beatty (1869-1941), Richard Jack (1866-1952), Mabel May (1877-1971) et Alfred Munnings (1878-1959), ainsi que les futurs membres du Groupe des Sept, A. Y. Jackson (1882-1974), Arthur Lismer (1885-1969) et Frederick Varley (1881-1969).
Même si la collection est exposée en grande pompe à la Burlington House de Londres au début de 1919 et voyagera ensuite en Amérique du Nord, le projet d’Aitken d’exposer les œuvres dans une galerie de souvenirs de guerre à Ottawa avorte lorsque l’attention du pays se détourne de la documentation des batailles pour se porter sur la mémorialisation des soldats morts au combat. Le Fonds réussit tout de même à faire la chronique des expériences de militaires canadiens survivants, mais la perte tragique de plus de 61 000 vies – exprimée dans des monuments qui, selon les mots de l’historien Robert Shipley, « s’inscrivent dans la tentative de donner un sens, sur le plan émotionnel et spirituel, à la perte de tant d’amis, d’êtres chers et de camarades » – suscite un plus grand intérêt sociétal. Après la guerre, plus de sept mille monuments commémoratifs sont érigés dans des communautés partout au Canada, financés pour la plupart par des résidents locaux. Le plus souvent, les lieux qu’on leur choisit se ressemblent en ce qu’ils sont centraux, mais leurs formes, elles, varient considérablement, allant de simples croix sur des piédestaux, comme dans la ville de Trochu, en Alberta, à des créations très élaborées, comme la Tour des soldat édifiée à la Hart House de l’Université de Toronto.
Environ quatre cents monuments commémoratifs au Canada comportent des figures, la plupart incarnant des soldats en uniforme, seuls ou en groupe. Le Monument commémoratif de guerre du Canada, 1925-1939, érigé sur la place de la Confédération, à Ottawa, est sans doute le plus ambitieux de tous avec sa grande arche de granit surplombant ses vingt-deux figures d’hommes et de femmes évoquant les différents services militaires ayant contribué à l’effort de guerre du Canada entre 1914 et 1918. En comparaison, la vaste majorité des monuments commémoratifs paraissent modestes. George W. Hill (1862-1934), le concepteur de monuments de guerre le plus prolifique au Canada, compte parmi ses sculptures les plus connues le Monument aux braves de Westmount (Québec) réalisé en 1922 et représentant une figure ailée qui indique le chemin de la victoire à un soldat en marche. Parmi les autres œuvres remarquables de Hill, citons le Monument aux anciens combattants de Charlottetown (Île-du-Prince-Édouard), 1923-1925, qui consiste en trois soldats chargeant des fusils sur un piédestal en granit, ainsi que le Monument aux braves de Sherbrooke (Québec) érigé en 1926 et où le motif des trois soldats est répété mais, cette fois, à la base d’un piédestal au sommet duquel est perchée une figure ailée symbolisant la Victoire que les militaires contemplent d’en bas. Bien que les monuments de guerre aient été nombreux à travers le pays, cela n’enlève rien à l’unicité du travail de conception d’Allward, qui rejette les pratiques conventionnelles portées sur la représentation de soldats, au profit d’une exploration plus provocante des idées de rédemption et d’avenir sans guerre.
Des monuments à la paix
Profondément marqué par la Première Guerre mondiale, Allward place ses convictions au cœur de son approche des monuments commémoratifs, adressant ainsi « une admonition contre la futilité de la guerre ». Comme il le fait remarquer à propos du Mémorial de Vimy, 1921-1936, « j’ai exclu la vengeance et la haine de ma conception. Dans mes dessins originaux, […] un pied […] foulait un casque d’acier allemand. Même ce symbole, je l’ai enlevé ».
Comme beaucoup de membres de sa génération, Allward considère la Première Guerre mondiale selon les termes de H. G. Wells, c’est-à-dire « la guerre pour mettre fin à la guerre », tragique mais nécessaire pour vaincre le militarisme allemand. Ce point de vue se reflète dans ses premières œuvres consacrées à la Première Guerre mondiale, à commencer par les deux modèles qu’il propose pour le monument à la mémoire des employés de la Banque de Commerce tombés au combat, sur la rue King Ouest à Toronto, The Service of Our Women–Healing Scars of War (Le service de nos femmes – Guérir les cicatrices de la guerre) et The Service of Our Men–Crushing the Power of the Sword (Le service de nos hommes – Détruire le pouvoir de l’épée), tous deux de 1918. Les thèmes de ces œuvres réapparaissent dans le Monument aux morts de Stratford, 1919-1922, et le Monument aux morts de Peterborough, 1921-1929, qui témoignent du sacrifice des soldats canadiens morts en Belgique et en France pour protéger la civilisation contre la barbarie et pour prévenir les guerres futures.
Ces idées sont exprimées de manière plus ambitieuse dans le Mémorial de Vimy, que l’historien Tim Cook décrira plus tard comme « un monument à la paix, et non à la victoire, un hommage à la perte et à la mort, et un appel au souvenir ». Le projet d’Allward pour Vimy surpasse en qualité toutes ses réalisations antérieures, car il développe plus avant l’idée de la quête d’un avenir meilleur grâce aux figures allégoriques sculptées dans la partie supérieure des pylônes jumeaux et représentant la Paix, la Vérité, la Connaissance, la Justice, la Foi, la Charité et l’Honneur – valeurs auxquelles, selon l’artiste, l’humanité doit aspirer.
Lorsque le mémorial est achevé en 1936, nombreux y voient un symbole de paix, comme en atteste la déclaration lue au nom du premier ministre William Mackenzie King le jour de l’inauguration du monument : « Le Canada demande aux nations d’Europe de déployer les efforts nécessaires pour effacer tout ce qui génère la guerre et la mort. Il les appelle à s’unir afin que naisse un monde de paix. C’est la responsabilité que nous, vivants, avons reçue de ceux qui ont souffert et qui sont morts. C’est une responsabilité commune. Un monde en paix, estime le Canada, tel est le seul mémorial digne du courage et du sacrifice de tous ceux ayant perdu leur vie à la Grande Guerre. » Cette conception du Mémorial de Vimy demeure intacte après son dévoilement, et pendant plus de quatre-vingts ans.
La contribution à la sculpture canadienne
Le rejet des idées de l’École des beaux-arts en matière de conception monumentale, qu’il applique dans des œuvres telles que le Monument à John Graves Simcoe, 1901-1903, et le Monument à John Sandfield Macdonald, 1907-1909 – présentant une composition pyramidale d’une seule figure statique sur un piédestal –, marque une étape importante vers l’indépendance intellectuelle et artistique d’Allward. Ses œuvres subséquentes, comme le Monument commémoratif Bell, 1909-1917, et le Monument au roi Édouard VII, qu’Allward entreprend en 1912 et qu’il ne terminera jamais, empruntent une autre direction. Influencé par le travail de Michel-Ange (1475-1564) et d’Auguste Rodin (1840-1917), l’artiste torontois explore une esthétique nouvelle, soit celle de la théâtralité, agençant des figures classique et expressives au sein de compositions horizontales qui favorisent le déplacement des spectateurs dans l’espace du monument. Allward persévérera dans cette voie avec le Monument aux morts de Stratford, 1919-1922, celui de Peterborough, 1921-1929, et enfin le Mémorial de Vimy, 1921-1936.
Allward aura au Canada un profond impact sur ses pairs sculpteurs. Son approche esthétique, ses techniques sophistiquées et l’accueil favorable que le public réserve à son œuvre contribuent à accroître la visibilité de la sculpture partout au pays, une transformation dont profitent les sculpteurs canadiens, notamment Emanuel Hahn (1881-1957), Frances Loring (1887-1968), Florence Wyle (1881-1968) et Elizabeth Wyn Wood (1903-1966). L’ayant assisté dans son atelier entre 1908 et 1912, Hahn est particulièrement proche d’Allward, une amitié que les deux hommes entretiendront jusqu’à la mort de ce dernier en 1955. En gage de cette amitié, Allward lègue à Hahn un grand nombre d’outils de sculpture personnels, en demandant qu’ils soient transmis d’une génération d’artistes à l’autre. La volonté d’Allward d’étendre le langage de la sculpture au-delà du style Beaux-Arts ainsi que son engagement au sein de diverses organisations artistiques sont des valeurs que partagent également ces artistes, tous membres fondateurs de la Société des sculpteurs du Canada en 1928. Ce groupe est reconnu pour avoir créé de nombreuses occasions d’exposer pour les sculpteurs canadiens tout en développant considérablement le langage de cet art au pays.
Parmi les artistes influencés par Allward, Loring est particulièrement élogieuse à l’égard de l’impact du sculpteur sur la société, revenant souvent sur le sujet du Mémorial de Vimy dans les nombreuses conférences qu’elle présente. Dans un discours prononcé en 1922 devant le Canadian Council of Women à Port Arthur (Ontario), Loring décrit en détail le chef-d’œuvre d’Allward : « Personne ne réalise plus belle œuvre de monument que M. Allward. Il a vécu une vie solitaire par manque de compréhension de la part de ses collègues artistes, mais le travail merveilleux qu’il a accompli pour le mémorial l’a placé au sommet de sa profession. » Quelques années plus tard, elle qualifie Allward de « plus grand sculpteur du Canada et, pour son œuvre monumentale, le meilleur du monde […]. Le Canada commence à peine à l’apprécier depuis que l’Europe a salué son génie, mais le Canada ne réalise pas encore qui il est vraiment. Cela dit, pour le monument de la crête de Vimy, on lui a donné carte blanche – et résultat, nous obtenons une œuvre de génie. » Loring exprime là un point de vue largement partagé par les contemporains d’Allward.
Une reconnaissance posthume
Quelques mois après la mort d’Allward en 1955, l’Académie royale des arts du Canada (ARC) présente une sélection de ses dessins et maquettes en plâtre ainsi que quelques photographies dans le cadre de sa soixante-seizième exposition annuelle tenue à la Art Gallery of Toronto (aujourd’hui le Musée des beaux-arts de l’Ontario). Par la suite, l’œuvre d’Allward reçoit peu d’attention critique, et ce, jusqu’en 1990, lorsque Lane Borstad dresse un catalogue des dessins et des sculptures de l’artiste dans le cadre de sa maîtrise.
La perte d’intérêt pour les œuvres d’Allward est liée à un rejet contemporain plus large de la contribution de la sculpture à la vie culturelle canadienne à la fin du dix-neuvième et au début du vingtième siècle. Une étude importante ose même suggérer qu’avant 1960, le Canada ne compte que « très peu de sculpteurs de substance. Il n’y a rien qui puisse être considéré comme réellement constitutif d’une tradition, rien à suivre ou contre lequel réagir. Il n’y a pas non plus de preuves indiquant une réelle prise de conscience ou un intérêt pour ce qui se passe dans la sculpture européenne ou américaine depuis le début du siècle. » Phénomène marquant, cette nouvelle opinion affecte non seulement les réalisations d’Allward mais également celles d’une foule de sculpteurs du début du vingtième siècle, dont Emanuel Hahn, Louis-Philippe Hébert (1850-1917), Frances Loring et Elizabeth Wyn Wood.
L’intérêt pour la sculpture canadienne est relancé au milieu des années 1980 avec la parution du livre de Terry Guernsey, Statues de la Colline du Parlement : histoire illustrée, 1986, et l’exposition Loring et Wyle : Sculptors’ Legacy (Frances Loring et Florence Wyle, ou les débuts d’un siècle) présentée au Musée des beaux-arts de l’Ontario (MBAO) en 1987. Une décennie plus tard, le Musée des beaux-arts du Canada (MBAC) rend hommage à deux autres artistes éminents du début du vingtième siècle dans l’exposition itinérante Emanuel Hahn et Elizabeth Wyn Wood. Tradition et innovation dans la sculpture canadienne.
Allward sort finalement de l’ombre en 2001 avec la publication du roman de Jane Urquhart The Stone Carvers, un récit de fiction portant sur le sculpteur et la construction du Mémorial de Vimy, 1921-1936, œuvre que l’auteure décrit de façon poignante comme « une urne énorme […] conçue pour contenir la peine ». Même si le travail d’Allward commence alors à récolter une certaine attention critique, presque toute la nouvelle érudition qui s’y rapporte se concentre sur la création qui marque le couronnement de son œuvre, soit le Mémorial de Vimy. La carrière d’Allward dans son ensemble reste largement méconnue.
La préservation de l’héritage d’Allward
Les principales sculptures d’Allward demeurent accessibles au public sur leur site d’origine. Nombre d’entre elles – dont quatre de ses œuvres à Queen’s Park, le Monument commémoratif de la guerre d’Afrique du Sud, 1904-1911, les monuments de Stratford, 1919-1922, de Peterborough, 1921-1929, et de Vimy, 1921-1936 – ont été restaurées au cours des dernières années, permettant au public de les découvrir dans un état quasi original. Les travaux effectués sur le mémorial de Vimy entre 2005 et 2007 dans le cadre d’un plus vaste effort du gouvernement canadien pour réparer les monuments de la Première Guerre mondiale en Europe constituent le projet de restauration d’œuvres d’art le plus ambitieux de l’histoire du Canada.
Une part de l’héritage d’Allward consiste en des pièces de plus petite taille, dont des sculptures et des dessins, conservés par le Musée des beaux-arts du Canada, le Musée des beaux-arts de l’Ontario et les archives de l’Université Queen’s. En plus de ces fonds, la collection du Musée canadien de la guerre comprend dix-sept des vingt figures en plâtre créées par Allward à Londres entre 1925 et 1930 pour le Mémorial de Vimy. Le Musée des communications et de l’électronique militaires à Kingston (Ontario) détient les trois autres, dont Canada Bereft (Le Canada en deuil).
Enfin, la portion de l’héritage d’Allward la mieux sauvegardée se trouve peut-être à Vimy. En 1996, le gouvernement du Canada désigne comme lieu historique national la parcelle de terre (1,17 kilomètre carré) sur laquelle s’élève le mémorial. Exploité par Anciens Combattants Canada et officiellement connu sous le nom de Mémorial national du Canada à Vimy, le site comprend un centre d’éducation des visiteurs qui, chaque année, informe des centaines de milliers de personnes sur le rôle du Canada et de Terre-Neuve dans la Première Guerre mondiale. En 2002, on nomme Allward personnage historique national sur recommandation de la Commission des lieux et monuments historiques du Canada. La plaque marquant cet honneur, dévoilée en juillet 2010 sur le lieu du Monument commémoratif Bell, 1909-1917, à Brantford (Ontario), présente l’artiste comme « un sculpteur exceptionnel, auteur de certains des plus beaux monuments publics du Canada » qui « s’est imposé comme une figure dominante de la transition entre les conventions sculpturales de l’ère victorienne et les formes plus abstraites du vingtième siècle ». Allward est également honoré par des plaques décernées par la Fondation du patrimoine ontarien en 2004, la filiale de Fort York de la Légion royale canadienne en 2007, et les Amis du Monument aux morts de Stratford en 2018.
La remise en question des monuments historiques
Le débat quant à la nécessité de retirer ou non des espaces publics les monuments commémorant des personnalités ou épisodes controversés s’intensifie depuis certains événements récents. Au Canada, le personnage le plus connu dont l’héritage appelle à une révision est sans aucun doute le premier ministre du pays, John A. Macdonald, critiqué pour son rôle dans l’instauration des pensionnats indiens – un système ayant autorisé l’enlèvement forcé des enfants autochtones à leur famille durant de longues périodes dans une perspective d’assimilation ethnique, leur interdisant de reconnaître leur identité raciale et religieuse, et de parler leur langue. Dans un geste de reconnaissance de cette injustice et dans le cadre du programme de réconciliation de la ville de Victoria, en Colombie-Britannique, avec les communautés autochtones locales, on déboulonne une statue de Macdonald devant l’hôtel de ville. Le conseil municipal de Victoria prend cette décision après avoir discuté avec les dirigeants autochtones, et un processus de consultation publique est lancé afin de déterminer le futur emplacement de la sculpture. Tant que le peuple canadien continuera à examiner et à interroger l’histoire, le débat sur la pertinence de certains monuments s’intensifiera.
Les sculptures d’Allward n’attirent généralement pas une attention négative, à l’exception de deux d’entre elles, soit le Monument à la rébellion du Nord-Ouest, 1894-1896, une œuvre érigée à la suite de la répression d’un soulèvement mené par le leader métis Louis Riel en 1885, ainsi que le Monument à Nicholas Flood Davin, 1903, au cimetière Beechwood, à Ottawa, lieu d’inhumation de ce dernier, avocat, journaliste et politicien auteur du rapport à l’origine de l’instauration du système des pensionnats indiens au Canada.
Pour le Monument à la rébellion du Nord-Ouest, Allward sculpte une figure féminine personnifiant la Paix. À l’époque, la majorité de la population canadienne considère nécessaire la réponse du gouvernement au soulèvement pour maintenir l’ordre public dans l’ouest du pays. Cette perspective changera avec le temps; aujourd’hui, on croit plutôt que ce conflit, communément appelé la résistance du Nord-Ouest, a privé les Métis de leur souveraineté. En 2017, en raison des liens entre le monument, le passé colonial du Canada et la perte de la souveraineté des Métis, la Nation métisse de l’Ontario adopte une résolution lors de son assemblée générale annuelle pour déplacer vers un autre site la majeure partie des cérémonies commémoratives annuelles de la journée Louis Riel, le 16 novembre, qui se tenaient au Monument à la rébellion du Nord-Ouest depuis 2011. À ce jour, aucune demande n’a été formulée pour le déplacement de l’œuvre. Les efforts de réconciliation pourraient toutefois inclure l’ajout d’une plaque sur le piédestal, en reconnaissance des membres des communautés métisses et autochtones morts dans ce conflit. Un tel geste irait de pair avec celui récemment posé pour la tombe de Davin au cimetière Beechwood, sur laquelle figure son portrait en buste réalisé par Allward en 1902 : une plaque historique a été installée devant le monument en 2017, indiquant que Davin est l’auteur du rapport ayant mené à l’établissement des pensionnats indiens au Canada. Ces gestes révèlent une approche des monuments publics qui en fait des marqueurs du passé, des points d’entrée permettant une meilleure compréhension des événements de l’histoire canadienne.
Les premières œuvres d’Allward figurent principalement d’importants personnages canadiens – parmi lesquels sir Wilfrid Laurier, George William Ross et sir Oliver Mowat – dont les politiques ne suscitent pas actuellement de vives controverses. Après l’achèvement du Monument commémoratif Bell à Brantford en 1917, Allward concentre ses efforts sur de nouvelles créations et la mémorialisation des membres des troupes canadiennes morts durant la Première Guerre mondiale. Pour élaborer ces œuvres, dont le point culminant est le Mémorial de Vimy, 1921-1936, Allward rejette les représentations typiques de sujets militaires et choisit plutôt de concevoir des œuvres traitant de thèmes relatifs à la rédemption. Sa dernière sculpture souligne le rôle de William Lyon Mackenzie dans l’établissement d’un gouvernement responsable, précurseur de la démocratie parlementaire canadienne. Somme toute, envisagée dans son ensemble, l’œuvre de Walter Allward continue d’exposer la population canadienne aux leçons essentielles de l’histoire.