À l’ombre de l’arbre v. 1914
McNicoll est surtout reconnue aujourd’hui comme peintre de femmes et d’enfants. Elle est fréquemment comparée aux impressionnistes comme Berthe Morisot (1841-1895) et Mary Cassatt (1844-1926), célèbres pour leurs propres représentations de la maternité. En tant que jeune femme, McNicoll conservait un album qui comportait beaucoup d’images de la maternité. Mais bien qu’elle ait peint plusieurs scènes de jeunes femmes avec des enfants, comme Minding Baby (Prenant soin du bébé), v. 1911, dans lesquelles une fille plus âgée surveille ses plus jeunes frères et sœurs, peu de ses œuvres peuvent être décrites comme des représentations de mère et d’enfant. À l’ombre de l’arbre est peut-être une exception, quoique la relation maternelle y est plus détachée et ne ressemble pas aux représentations plus physiquement intimes de Cassatt, comme dans Mother About to Wash Her Sleepy Child (Mère s’apprêtant à laver son enfant somnolent), 1880. Plutôt que de porter toute son attention sur l’enfant, la mère (ou la sœur, la nourrice?) lit un livre, perdue dans son propre monde alors que le bébé dort. Sa main repose sur le côté du landau, mais ne touche pas tout à fait l’enfant.
Ce moment de repos est un bon exemple des études réalisées par McNicoll sur des figures tranquilles de femmes modernes dans les années plus tardives de sa carrière, comme on l’observe dans Beneath the Trees (Sous les arbres), v. 1910, The Chintz Sofa (Le divan de chintz), v. 1913, et The Victorian Dress (La robe victorienne), 1914. Ces œuvres, représentant souvent des femmes lisant ou cousant, appartiennent à une longue tradition artistique qui montre des femmes habitant leur propre monde intérieur alors qu’elles s’adonnent tranquillement à des tâches domestiques ou à de calmes loisirs. Elles rappellent, par exemple, l’âge d’or hollandais et le travail de Johannes Vermeer (1632-1675), qui confère une forme de vertu morale à des femmes représentées seules dans un espace domestique.
Des spécialistes comme Rozsika Parker soutiennent que la lecture et la couture étaient, au dix-neuvième siècle, des actions potentiellement subversives pour des femmes limitées à la sphère privée : lire et coudre pouvaient être considérées comme des exercices stimulant l’imagination et le rêve, une évasion de la besogne domestique et de l’éducation des enfants. Dans Prenant soin du bébé, v. 1911, les filles les plus âgées, concentrées sur leur couture, n’ont pas remarqué que l’enfant dans le landau s’est éveillé.