Performance réduite : respiration no 5 2009-2011
Performance réduite : respiration no 5 fait partie d’une série intitulée Reduced Performing (Performance réduite) que Lake crée entre 2008 et 2011. Elle y explore les thèmes du temps, de la durée, du mouvement et de la perception en s’allongeant sur un scanner à plat d’environ 2,5 mètres de long dans l’atelier de son imprimeur pour un balayage de douze minutes. Dans cette série – sa première expérience avec la photographie numérique – elle emploie une technologie sophistiquée pour étudier les limites du mécanisme de reproduction de l’image dans la création artistique.
Dans toutes ses œuvres photographiques, notamment sa série parallèle Extended Breathing (Profonde respiration), 2008-2014, Lake est un personnage tridimensionnel dans un monde bidimensionnel. Son hyper-conscience de ce qui se passe pendant sa performance, ainsi que pendant la performance de la caméra, lui permet de s’engager dans une sorte de tromperie conceptuelle qui interroge à la fois le moi et le moyen d’expression. Dans la série Performance réduite, Lake pousse cette investigation un peu plus loin en s’aplatissant dans le scanner, de sorte que le processus lui-même est pleinement impliqué dans le résultat. Comme dans ses premières photographies, les limites de la photo ont pour effet d’effacer les actions subtiles qui sont à l’étude. Bien que Lake demeure allongée sur le scanner pour une exposition de douze minutes, l’appareil ne peut pas documenter sa respiration. L’image qui en résulte semble faire disparaître ses subtils mouvements d’inspiration et d’expiration. Dans d’autres variations de la série, Lake cligne des yeux ou pleure alors qu’elle est allongée sur le plateau, avec le même résultat.
Quelque chose ressemblant à de l’hyperréalisme et à de la peinture numérique émerge : le corps entier de Lake est représenté comme s’il s’agissait d’un fac-similé direct, mais avec les teintes de l’arc-en-ciel et les indices de saturation de la décomposition RVB (rouge/vert/bleu) du scanner. Le scanner à plat est à la fois trop sophistiqué dans la sculpture visuelle du corps de l’artiste, et pourtant, malgré (ou peut-être à cause de) cette efficacité robotique, il ne peut pas enregistrer les subtilités de l’émotion qui se joue sur son visage. Lake visualise la réalité froide et calculée de la technologie qui est incapable de saisir les nuances de la condition humaine.