Des décennies avant que l’« égoportrait » ne déclenche une révolution culturelle, Suzy Lake (née en 1947) change le cours de l’histoire de l’art en se faisant le sujet de ses photos, utilisant sa caméra comme un outil pour étudier comment la société fabrique des images d’identité. Intégrant des éléments de théâtre, de performance et de jeu de rôle, Lake mélange la technologie et l’art pour créer des œuvres fascinantes, à ce point en avance sur leur temps qu’il faut au monde de l’art près de deux décennies pour les rattraper. Lake est reconnue comme l’une des plus importantes photographes au monde, de celle qui ouvre la voie à une nouvelle génération d’artistes qui se produisent devant la caméra, notamment Cindy Sherman, qui a reconnu l’influence considérable de Lake, et Meryl McMaster.
Née à Detroit, Lake étudie la peinture et le dessin à l’université. Elle devient rapidement active en politique, contribuant au mouvement des droits civils des années 1960. Elle immigre à Montréal en 1968, s’immergeant dans la vibrante scène artistique de la métropole, assistant le peintre Guido Molinari (1933-2004), développant sa propre vision de l’art conceptuel et participant à la culture artistique de la ville. Elle s’installe plus tard à Toronto, où elle devient une enseignante influente à l’Université de Guelph tout en développant sa pratique et en créant des personnages de la culture pop telle Suzy Spice. Aujourd’hui l’une des plus grandes artistes vivantes du Canada, Lake est lauréate du Prix de photographie Banque Scotia 2016 tout comme elle a reçu le Prix du Gouverneur général en arts visuels et en arts médiatiques.
« Grâce à l’amalgame de performance et de photographie, enrichi par ses talents de peintre, de dessinatrice et de graveuse, Suzy Lake crée des œuvres provocantes et fascinantes depuis plus de cinquante ans. » Erin Silver
Dans Suzy Lake : sa vie et son œuvre, l’historienne de l’art Erin Silver étudie les intérêts de Lake pour les questions d’identité, en relation avec la société, le genre et les expériences universelles de pouvoir et d’autorité, ainsi que l’extraordinaire éventail de ses expérimentations créatives avec divers matériaux. En ouvrant de nouvelles perspectives sur les projets extrêmement variés de Lake, Silver révèle comment sa pratique inventive a provoqué le public pendant des décennies et encore aujourd’hui.
Erin Silver est professeure adjointe au Département d’histoire de l’art, d’art visuel et de théorie à l’Université de la Colombie-Britannique. Historienne et commissaire de l’art féministe et queer, de la culture visuelle, de la performance et de l’activisme, elle a obtenu son doctorat en histoire de l’art et en études sur les femmes et le genre à l’Université McGill en 2013. Les écrits de Silver ont été publiés dans C Magazine, CAA Reviews, Canadian Art, Ciel Variable, Prefix Photo, Fuse Magazine, Momus, Performance Matters, Visual Resources et dans divers catalogues d’exposition consacrés à la photographie canadienne et à l’art féministe et queer. Elle est co-éditrice de Otherwise: Imagining Queer Feminist Art Histories, éditrice intellectuelle pour RACAR (Revue d’art canadienne / Canadian Art Review).