Dans la forêt blanche 1932
Pour Macdonald, ce paysage constitue l’une des premières tentatives d’exprimer la dimension spirituelle de la nature dans ses œuvres. Baignés d’une chaude lumière, les monticules formés par les branches enneigées possèdent une qualité biomorphique, vitaliste. Une subtile diagonale insuffle une certaine impulsion rythmique au centre quasi utérin de la composition. Par sa couleur, son traitement et son atmosphère, ce tableau se distingue de ses autres œuvres de jeunesse.
Macdonald écrit à Harry McCurry, le directeur de la Galerie nationale du Canada (aujourd’hui le Musée des beaux-arts du Canada), à Ottawa, que l’œuvre représente « de jeunes arbres enneigés s’abritant parmi les grands sapins que l’on trouve sur le mont Grouse. […] Le traitement du sujet exprime […] l’interprétation intérieure (mentale) de la neige dans la forêt bien plus que l’autre impression visible. » Dans la même lettre, il demande à McCurry de lui envoyer des reproductions des images nordiques d’inspiration théosophique de Lawren Harris (1885-1970), dont une du lac Supérieur, de même que Mountain Forms (Formes montagneuses), 1926, et Icebergs, Davis Strait (Icebergs, détroit de Davis), 1930, ou un autre sujet arctique de Harris.
Comme d’autres artistes à l’époque, Macdonald cherche à donner forme au spirituel dans son travail. À Vancouver, la spiritualité de l’art est un sujet de discussion récurrent aux rencontres musicales de John Vanderpant, et Macdonald l’aborde également dans ses classes.
En 1934, Macdonald peint une seconde version de The Black Tusk (La défense noire). Si l’image de 1932 représente la puissance terrestre, cette version subséquente semble empreinte d’une recherche spirituelle. La monumentalité statique a cédé la place à une flèche, le terrain intermédiaire a disparu, et la défense noire surplombe l’avant-plan, son pic devenant le sommet d’un triangle acutangle. Macdonald a lu les écrits contemporains de Harris, y compris l’article « Revelation of Art in Canada », publié dans The Canadian Theosophist, où Harris se dit convaincu que l’art est « l’épitome de l’ordre cosmique » et que l’artiste doit « insérer l’harmonie spirituelle et cosmique dans le chaos de l’apparence afin de révéler l’unité plastique de l’existence ». À partir de cette période, le spirituel sera au cœur de la quête de Macdonald.