En 1926, Jock Macdonald (1897-1960) quitte l’Angleterre pour se saisir du poste de directeur du département de design à la Vancouver School of Decorative and Applied Arts (aujourd’hui l’Emily Carr University of Art + Design), nouvellement établie. Macdonald s’installe à Vancouver en septembre de cette année et consacre le reste de sa vie à l’enseignement et à la peinture.
À la fin des années 1920, Vancouver connaît une période d’effervescence, ce qui représente un changement radical par rapport au conservatisme de l’époque victorienne qui, en 1913, avait découragé Emily Carr (1871-1945), la poussant à abandonner la peinture pendant plus d’une décennie. La fondation de la Vancouver School of Decorative and Applied Arts (VSDAA) est un élément essentiel de cette transformation, tout comme l’arrivée en ville de deux hommes : Fred Varley (1881-1969), célèbre peintre portraitiste, paysagiste et membre du Groupe des Sept, nommé directeur du département de dessin, de peinture et de composition au sein de l’institution; et John Vanderpant (1884-1939), photographe reconnu sur la scène internationale. Tous deux auront une profonde influence sur Jock Macdonald.
Varley s’éprend des paysages de la Colombie-Britannique et organise des excursions de dessin avec ses collègues et étudiants. Bien qu’il amorce sa carrière dans le design et l’illustration, Macdonald s’intéresse de plus en plus à la peinture et partage un atelier avec Varley, qui devient son mentor. Se rendant compte que la splendeur des paysages nécessite un médium plus puissant que l’aquarelle ou la détrempe de ses premières œuvres, Macdonald commence à peindre à l’huile et réalise des tableaux comme Église de Lytton, C.-B., 1930. Le lien privilégié qu’il établit avec les paysages accidentés de la Colombie-Britannique, son identification spirituelle avec la nature et sa détermination à traduire en peinture l’expérience du paysage le lancent dans une quête qui marquera à jamais sa démarche picturale.
En 1926, Vanderpant et Harold Mortimer-Lamb (1872-1970) ouvrent les Vanderpant Galleries, consacrées à la photographie et à l’art contemporain ainsi qu’à la promotion du travail des artistes de la Colombie-Britannique. La galerie devient vite un fer de lance de l’art moderne à Vancouver et, de 1928 à 1939, un lieu de rassemblement pour les intellectuels et les communautés artistiques de la ville.
Vancouver demeure une ville conservatrice sur le plan culturel, mais un nombre croissant de ses habitants s’intéressent aux idées nouvelles, et particulièrement à la pensée et à la spiritualité orientales. En avril 1929, le Vancouver Theatre est bondé, et des milliers d’autres personnes font la file pour entendre le poète et philosophe indien Rabindranath Tagore qui « transporte son auditoire dans un univers d’esthétique pure ». Le conseil que Fred Varley donne à ses étudiants résume assez bien l’atmosphère du milieu artistique vancouvérois de la fin des années 1920 et du début des années 1930 : « Oubliez tout ce qui n’est pas mystique ». En 1932, Macdonald peint Dans la forêt blanche – un tableau qui marque un tournant dans sa démarche et le début de son étude de l’esprit de la nature dans l’art, à laquelle il allait se consacrer toute sa vie.
Cette période exaltante ne durera pas. Avec l’avènement de la grande dépression, les salaires des enseignants de la VSDAA subissent des coupures substantielles. Macdonald et Varley s’insurgent lorsqu’ils découvrent que tous n’assument pas leur juste part du fardeau et, en 1933, ils démissionnent en guise de protestation.
Cet essai est extrait de Jock Macdonald : sa vie et son œuvre par Joyce Zemans.