Dans la production de l’artiste du 19e siècle Paul Kane (1810-1871), Les chutes Cackabakah constitue un superbe exemple de son appropriation de la notion du sublime. En représentant les chutes Kakabeka sur la rivière Kaministiquia près de ce qui est aujourd’hui la ville de Thunder Bay, en Ontario, l’artiste choisit comme sujet une des merveilles naturelles se trouvant sur la route des voyageurs de la Compagnie de la Baie d’Hudson (CBH). Il dépeint les chutes comme une terrifiante force de la nature, avec l’intention d’inspirer et de saisir le regardeur, alors que la bande de terre se trouvant au premier plan nous propose un point de vue stable, à une distance acceptable de la chute.
La lumière ricoche sur les immenses nappes d’eau qui tombent en cascade, se trouve reflétée par les striations horizontales de la pierre chert, et lutte pour dominer les nuages d’un ciel orageux. La petite taille des figures autochtones se trouvant sur les berges de la rivière constitue un procédé typique de l’art romantique visant à donner une notion de l’échelle tout en mettant l’accent sur l’immensité de cette merveille naturelle – et, par un effet de projection, sur l’expérience de l’artiste lui-même.
Dans le journal de voyage qu’il écrivait pendant ses aventures avec la CBH, Kane ne mentionne pas les chutes par leur nom, ni sa réaction face à ce paysage; il se contente de noter qu’il réalise des croquis de deux portages durant cette étape du périple. D’une façon, c’est comme s’il se fie sur le dessin pour documenter une expérience avec exactitude, et sur la peinture pour exprimer les émotions suscitées par cette expérience.
Cette rubrique en vedette est extraite de Paul Kane : sa vie et son œuvre par Arlene Gehmacher.