Les masques du passé

Brian Jungen (né en 1970), artiste d’ascendance dane-zaa et suisse de renommée internationale, établi dans le nord de l’Okanagan, est surtout reconnu pour avoir transformé des matériaux du quotidien en sculptures complexes. En réponse à la pandémie de coronavirus, il crée Masque de l’épidémie, 2020, qui rappelle les masques à bec portés par les médecins traitant les patients atteints de peste bubonique dans l’Europe du dix-septième siècle. Les médecins croyaient alors que le fait de remplir le bec de fleurs, d’herbes et d’épices séchées les protégerait de ce qu’ils croyaient à tort être une maladie transmise par l’air. L’invention de ce masque particulier est attribuée à Charles de Lorme, un médecin qui comptait parmi ses patients de nombreux membres de la royauté européenne.

Jungen réinterprète ce masque obsédant en déconstruisant des chaussures Air Jordan de Nike. L’œuvre n’a toutefois pas l’aspect sinistre de sa référence, grâce à la familiarité du matériau et ses couleurs vives. Une tension est cependant manifeste entre la pratique et les aspirations sportives, qui sont évoquées par la sculpture et incarnées dans les espadrilles, et les connotations de maladie et de protection qu’elle sous-tend. Jungen commence à déconstruire des chaussures de sport et à les réassembler en sculptures inspirées des masques cérémoniels de la côte Ouest dans sa série révolutionnaire Prototypes for New Understanding (Prototypes pour une nouvelle compréhension), 1998-2005. Masque de l’épidémie est la première œuvre de Jungen à s’inspirer d’un masque historique extérieur à la culture autochtone. Il en a depuis réalisé deux autres, intitulées Plague Mask 2 (Masque de l’épidémie 2), 2020, et Plague Mask 3 [fever dream] (Masque de l’épidémie 3 [rêve de fièvre]), 2020.

Cette œuvre a été présentée dans l’Infolettre de l’IAC du 2 octobre 2020, « Creativity in the Time of COVID » [en anglais seulement]. Lisez cette infolettre ici, ou inscrivez-vous pour recevoir nos actualités hebdomadaires sur l’art canadien.