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Le marécage aux atocas 1916

Tom Thomson, Le marécage aux atocas, 1916

Tom Thomson, Le marécage aux atocas (Cranberry Marsh), 1916

Huile sur bois, 21,9 x 27 cm

Musée des beaux-arts du Canada, Ottawa

Comme beaucoup d’esquisses à l’huile de 1916, Le marécage aux atocas marque un changement dans le mode d’expression de Thomson. Ce virage, amorcé quelques mois auparavant, devient plus prononcé après son excursion au lac Cauchon avec Lawren Harris (1885-1970) et le docteur James MacCallum au début du printemps. Le cheminement artistique de Thomson n’a pas toujours été linéaire, mais la prise en considération de ses quelque 400 esquisses énergiques et variées dans leur ensemble nous permet de retracer certaines tendances dans son œuvre. Les conventions traditionnelles du paysage commencent à disparaître, ses teintes se font plus vibrantes, et bien que les sujets demeurent reconnaissables, ses compositions deviennent des champs de bataille où les couches de peinture s’entremêlent et s’affrontent.

 

At Canada Institute, Photographie de Tom Thomson sur le lac Canoe, v. 1915-1916
Photographie de Tom Thomson sur le lac Canoe, v. 1915-1916. Probablement prise par Maud Varley.

En tant que sujet, Le marécage aux atocas n’a rien de spectaculaire : un marécage devant une petite colline arrondie sous un chaud soleil de début d’été. Mais Thomson en fait une scène lumineuse et d’une grande vivacité. L’horizontalité est forte et puissante, à l’exception de la cambrure de la colline, qui délimite la voûte céleste, et de la légère courbe à l’avant-plan.

 

Ce qui surprend toutefois, c’est le champ radieux au milieu du marécage lui-même : les brillants jaunes dorés, les oranges tangerine et les traits épars de cramoisi d’alizarine évoquent un tapis de soleil ou les braises les plus ardentes d’une forge. Dans cette grande zone plate, émergent de petites taches de couleur lapis-lazuli avec une touche de vert sarcelle d’une intensité éclatante, une teinte qui contraste fortement avec la palette de l’œuvre, tel un abrupt changement de rythme en musique.

 

Thomson commence ici à se distancier de son sujet pour se tourner vers l’abstraction. Il est déjà des années en avance sur son cercle d’amis. Harris, Franklin Carmichael (1890-1945) et d’autres artistes proches du Groupe des Sept aborderont l’abstraction des années plus tard, lorsqu’ils auront enfin compris que la peinture peut être autre chose qu’une illustration, et que la création d’une image peut véhiculer un état émotif ou une sensation esthétique. Le marécage aux atocas, comme Après la tempête (After the Storm), 1917, est un pas en direction de l’abstraction – un pas de plus vers un monde que Thomson n’aura jamais la chance d’explorer.

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