Concept spatial, géométrie 1968
Concept spatial, géométrie capture les deux philosophies de Nakamura, celle de l’art et celle de la science. Le tableau est un quadrillé blanc sur fond noir. Des formes géométriques bidimensionnelles (dont certaines ont été recadrées), qui vont du triangle au cercle en passant par le carré, partent du coin inférieur gauche et se déplacent en hauteur, le long du côté gauche et puis vers la droite, suivant la bordure supérieure. Le quadrillé blanc fait allusion à l’intérêt de l’artiste pour la grille en tant qu’outil incontournable en art et en science, et les formes géométriques illustrent son interprétation de l’histoire de l’art, de la Renaissance aux temps modernes. Peinte en 1968, cette œuvre emblématique est accrochée dans le salon de Nakamura pendant les dernières années de sa vie.
Dans le cadre d’une entrevue en 1972, la personne qui le questionne passe la remarque suivante à propos de Concept spatial, géométrie : « Cela ressemble presque à un graphique des formes prises par l’art occidental, n’est-ce pas? » À quoi Nakamura répond, « ce n’est pas seulement cela, mais aussi ce qui s’est passé en science; c’est-à-dire le retour aux bases qui sont fondées sur les formes issues de la géométrie ». Il explique que les formes géométriques ascendantes représentent l’éloignement progressif de notre perception tridimensionnelle et terrestre du monde, définie d’abord par la Renaissance et représentée par le triangle. Viennent ensuite le losange – le carré incliné – qui correspond au moment où l’impressionnisme se combine à l’influence de l’art japonais, puis le carré, qui réfère au cubisme. L’humanité prend ensuite un virage (littéralement dans le tableau), avec l’octogone et le cercle, qui symbolisent l’essor de l’art abstrait. En science, ces formes marquent l’abandon progressif de la gravité par l’humanité, celle-ci découvrant que tout dans l’univers est circulaire. Selon Nakamura, l’alunissage marque le moment où nous atteignons l’ellipse, puis le voyage continue, au-delà du cadre et des limites de notre coin d’univers .
Spatial Concept/Evolution (Concept spatial/Évolution), 1970, en quelque sorte l’œuvre sœur de Concept spatial, géométrie, reformule l’interprétation que fait Nakamura de l’évolution de l’art selon sa propre progression visuelle personnelle exemplifiée par des formes géométriques. Cette œuvre est marquée par un motif de grille composé de lignes diagonales s’élevant du coin inférieur gauche au coin supérieur droit. La manière dont le grillage est créé, avec ses carrés individuels circonscrits par des ondes, est peut-être une ingénieuse façon trouvée par Nakamura pour dépeindre la dualité quantique onde-particule, le parallèle scientifique à l’évolution de son œuvre.
Depuis au moins le milieu des années 1950, l’art de Nakamura a toujours porté sur le monde atomique sous une forme ou une autre, et cette interprétation prend tout son sens dans le présent contexte. Dans l’œuvre, la raison pour laquelle les deux côtés se rencontrent le long de la diagonale peut faire référence à l’évolution de la pensée humaine d’un côté, qui rencontre ou qui se rapproche de plus en plus de la réalité qu’elle cherche à décrire. Il convient également de noter l’étrange ressemblance entre la grille et sa couleur dans la peinture de Nakamura et les images du cœur des réacteurs nucléaires. La teinte vert bleuté de l’eau si souvent photographiée est due à l’effet Cerenkov, un phénomène électromagnétique qui génère une émission lumineuse (le rayonnement Cerenkov) lorsqu’une particule chargée d’une barre de combustible se déplace plus rapidement que la lumière dans l’eau des réservoirs de refroidissement. Nakamura aurait eu vent de cet effet grâce à Scientific American, qui a accumulé, au fil des ans, de nombreux articles s’y rapportant.