Formes noires en évolution 1953
Black Evolving Forms (Formes noires en évolution) est l’une des mieux réussies parmi les premières huiles non-objectives de Macdonald. Sa composition est solide – un motif circulaire irrégulier de couleur noire évoquant des formes d’oiseaux mis en valeur par un fond orange –, mais son apparente simplicité est trompeuse.
Macdonald semble y expérimenter la théorie du « push and pull » avec laquelle il s’est familiarisé vers la fin des années 1940, lorsqu’il a suivi les enseignements de Hans Hofmann (1880-1966). Selon ce dernier, les formes et les couleurs interagissent entre elles pour créer une impression d’espace et de mouvement, et ainsi engager le spectateur dans l’œuvre. Les couleurs chaudes semblent avancer, les froides, reculer, tandis que les zones claires et sombres ainsi que les formes superposées donnent l’illusion que la composition respire. Dans Formes noires en évolution, Macdonald dispose subtilement un fond presque monochrome sur un carré irrégulier de teinte plus claire, et peint une bordure grise, tel un cadre intégré. La superposition des formes dans cet espace restreint et la tension entre les couches de couleur suggèrent une connaissance des théories de Hofmann et témoignent d’un développement remarquable du style de Macdonald.
Comparativement à certaines huiles automatiques antérieures, comme Ocean Legend (Légende de l’océan), 1947, où Macdonald tente de reproduire le dynamisme et l’aisance de ses aquarelles, cette œuvre est fluide et épurée, bien que l’artiste ne soit pas encore passé aux grands formats que les peintures acryliques lui permettront bientôt de réaliser. Sa couleur, toutefois, s’est affranchie des contraintes de la ligne et des éléments de design que l’on retrouve dans des œuvres comme Bird and Environment (L’oiseau et son milieu), 1948.
Macdonald devait être satisfait de Formes noires en évolution. En janvier 1954, il la soumet à la Willistead Gallery (aujourd’hui l’Art Gallery of Windsor) en vue de l’exposition Four Modern Canadians, qui présente son travail aux côtés de celui d’Hortense Gordon (1889-1961), Sydney H. Watson (1911-1981) et Percy Taçon (1902-1983). En février, il organise le transport de l’œuvre à la Roberts Gallery de Toronto pour qu’elle y fasse partie de la toute première exposition du collectif Painters Eleven. Macdonald est persuadé que ce groupe initiera le public canadien hors Québec à l’art abstrait contemporain – et c’est exactement ce qui arrive.