Hauteurs E 1971
Uplands (Hauteurs) de Gershon Iskowitz, une suite de neuf tableaux diptyques produits entre 1970 et 1972, chevauche les séries Lowlands (Basses-terres) et la peinture à trois panneaux Uplands (Hauteurs), 1969-1970. Chaque tableau est identifié d’une lettre entre A et K (les lettres I et J n’ont pas été utilisées). Hauteurs E marque le point médian de la série, avec une structure plus ouverte que certaines autres. La forme centrale flottante s’exprime par des grappes de mouchetures et des ovoïdes diffus qui continuent dans ce qui peut sembler être le sol — une subtile transparence générale. La ligne d’horizon est, elle aussi, diffuse, repoussée au fond, telle une trace à peine visible traversant les deux panneaux.
Comme dans les peintures de la série Basses-terres et les ovoïdes de Paysage d’automne #2, 1967, les grappes de mouchetures créent une forme biomorphique centrale et excentrique. Chacune des peintures de Hauteurs montre une ligne d’horizon dans une position latitudinale distincte et à différents degrés d’expression. Dans trois d’entre eux, Hauteurs B, G et H, la forme centrale est d’une couleur primaire vive qui définit le contour : deux sont bleus et une est rouge. Les six autres présentent une structure plus ouverte.
En écrivant sur ces œuvres illusionnistes, les spécialistes ont tenté de les expliquer par des analogies avec l’histoire de l’art. David Burnett les compare aux dernières toiles de la série des Nymphéas de Claude Monet (1840-1926) parce que le sujet et le tableau lui-même transcendent tous deux l’illustration littérale. Roald Nasgaard écrit à propos des peintures de Hauteurs :
Ces diptyques sont d’étranges combinaisons de paysages panoramiques et de formes abstraites… Le rideau de nuages et le paysage sont tous deux exécutés avec de grands coups de pinceau impressionnistes, plutôt comme des mouchetures tachistes, peintes l’une dans l’autre et s’unissant pour former une couverture de couleur bigarrée.
L’ami d’Iskowitz, l’artiste David Bolduc (1945-2010), remarque en 1971 : « Ce sont comme des galaxies bizarres, comme un Star Trek déjanté. »
Il s’agit à cette époque des œuvres les plus ambitieuses d’Iskowitz en termes d’ampleur et de complexité, et elles l’établissent solidement comme un artiste digne de mention. Hauteurs E, F et G sont exposées pour la première fois à la Galerie Moos en novembre 1971, et Brydon Smith, conservateur d’art contemporain au Musée des beaux-arts du Canada, écrit qu’il les trouve « de toute beauté ». Quatre mois plus tard, le Musée des beaux-arts du Canada demande d’emprunter Hauteurs C, E, G et H pour les inclure dans l’exposition canadienne de la prestigieuse Biennale de Venise. Par la suite, le musée achète Hauteurs E pour sa propre collection. Quatre tableaux de cette série ont été sélectionnés pour la rétrospective Iskowitz du Musée des beaux-arts de l’Ontario en 1982.
Iskowitz a d’abord utilisé le format diptyque dans deux œuvres de Seasons (Saisons) en 1968-1969, Seasons No. 1 (Saisons no1) et Seasons No. 2. (Saisons no2). Il est fasciné lorsqu’il réalise, en poursuivant son exploration par une série d’œuvres, que les tableaux ne sont jamais en conflit les uns avec les autres, mais qu’ils peuvent même être appariés. Il revient périodiquement à ce double format tout au long de sa carrière, y compris dans ses dernières toiles.