Descente de Croix v. 1934-1935
Dans ce dessin, Munn réalise sa représentation la plus achevée de la déposition du Christ, un sujet qu’elle explore plusieurs fois, comme dans son premier monotype, Sans titre (Descente de Croix), v. 1927.
Elle y montre son génie par la façon dont elle crée une image profondément originale, sans pour autant abandonner l’histoire traditionnelle. Les trois croix et les pointes acérées du paysage cristallin et cosmique semblent fixer la composition au papier. On discerne le corps inanimé du Christ au centre d’un enchevêtrement de figures qui tombent en cascade dynamique, suivant une diagonale orientée de gauche à droite et de haut en bas. Un grand rayon de lumière blanche met le corps du Christ en évidence. Dans ce paysage fractionné, Munn insère, en une allusion métaphorique, un mince croissant de lune.
Puissante et dynamique, cette Descente de Croix est une image saisissante, à la fois pathétique et extatique, alimentée de contradictions complémentaires. Elle révèle la dessinatrice virtuose qu’est Munn et son habileté à marier une esthétique moderne d’avant-garde à des sujets traditionnels. Voilà sa remarquable contribution à l’art moderne.
En traitant ce sujet, Munn fait une déclaration audacieuse et définitive. Elle fait connaître ainsi son ambition d’aborder le grand récit de l’histoire de l’art européen, aux côtés des grands maîtres qu’elle admire. Munn connaît certainement l’une des œuvres les plus vénérées de l’art européen : la Déposition de Croix, v. 1435, de Rogier Van der Weyden (1399-1464), peinte cinq cents ans plus tôt.