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La vieille scierie 1880

Homer Watson, La vieille scierie, 1880

Homer Watson, The Pioneer Mill (La vieille scierie), 1880
Huile sur toile, 86 x 127,8 cm

Royal Collection Trust, Château de Windsor, Berkshire

Aucune peinture n’a été plus importante pour la carrière de Watson que La vieille scierie. Cette grande toile montre un petit moulin délabré et manifestement non fonctionnel niché dans un paysage romantique de falaises abruptes et d’arbres enhavissants; les formes et les détails de chaque objet sont rendus par le dessin soigné qui caractérise les premières œuvres d’art de Watson. Son achat en 1880 par le gouverneur général du Canada, le marquis de Lorne, comme cadeau pour la reine Victoria, demeure l’histoire la plus connue du passage de Watson de l’obscurité à la renommée internationale.

 

Les souvenirs de Watson ont quelque peu exagéré l’événement. Il n’y a jamais eu, par exemple, une « enflammée » dans le Globe de Toronto qui disait « Un garçon de campagne peint une toile achetée par la princesse Louise » (la fille de la reine et l’épouse de Lorne) comme l’a écrit Watson.  Néanmoins, l’achat mène à une relation continue avec Lorne, qui achète des œuvres subséquentes de Watson et qui se sert également de ses relations pour faire avancer la carrière de l’artiste en Grande-Bretagne à partir de la fin des années 1880. Entre autres choses, en 1889, Lorne donne à Watson accès à la salle dans laquelle le tableau est accroché dans le château de Windsor afin qu’il puisse en tirer une gravure.

 

Homer Watson, The Pioneer Mill (La vieille scierie), 1890
Homer Watson, The Pioneer Mill (La vieille scierie), 1890, eau-forte à l’encre brun foncé sur papier vélin, 33,4 x 44,5 cm, plaque: 30,2 x 44,5 cm, collection privée. 
Homer Watson, Life and Thought Hath Fled Away (La vie et la pensée se sont enfuies), v.1865-1869
Homer Watson, Life and Thought Hath Fled Away (La vie et la pensée se sont enfuies), v.1865-1869, graphite, encre noire et lavis sur papier vélin, 17,8 x 23,4 cm, carnet de croquis page 7875.96, Musée des beaux-arts du Canada, Ottawa. 

La vieille scierie, qu’il s’agisse de l’huile ou de la gravure à l’eau forte, est bien de son temps et de son lieu. L’Ontario de la fin du dix-neuvième siècle est fascinée par son histoire récente, et surtout par la rusticité et l’indépendance qui sont largement associées aux pionniers. L’industrialisation galopante de la province au cours des décennies autour de 1880 entraîne des vagues de regrets devant le déclin des pittoresques moulins à eau, symboles d’une société soi-disant plus simple mais en voie de disparition. Ce thème revient souvent dans l’œuvre de Watson, notamment dans un dessin fini intitulé Life and Thought Hath Fled Away (La vie et la pensée se sont enfuies), v.1865-1869. Un état de négligence similaire définit La vieille scierie : le toit est endommagé, le bâtiment est envahi par les arbres, et le chenal à l’abandon dévie le courant d’eau trop loin pour faire tourner la roue.

 

Pour Watson, tout cela est très personnel. Le bâtiment de La vieille scierie rappelle celui que le grand-père paternel de Watson avait construit à Doon. Toutefois, il ne s’agit pas d’une représentation exacte de la scierie et de ses environs. Par exemple, la falaise qui se dessine ajoute une touche romantique qui s’inspire probablement des vallées fluviales que Watson a vues quelques mois plus tôt au cours de son périple dans l’État de New York. Le peintre est bien conscient que la chute de la scierie de son grand-père (symbolisée notamment par l’arbre mort dans l’image) est due à une industrialisation sauvage et à l’avidité des hommes. Dans un long essai inédit, il explique comment la scierie de son grand-père, en dévorant sans relâche les arbres, a créé un terrain vague qui a fini par entraîner l’effondrement de la scierie.  Pour Watson, La vieille scierie est autant une mise en garde contre la dégradation de l’environnement par l’homme qu’un hymne aux pionniers de la région de Doon.

 

 

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