En Télécharger le livre Tous les livres d’art Accueil

Hommage au R 34 [Peinture murale de l’aéroport de Dorval] 1967-1968

Greg Curnoe, Hommage au R 34, October 1967–March 1968

Greg Curnoe, Homage to the R 34 [The Dorval Mural] (Hommage au R 34 [Peinture murale de l’aéroport de Dorval]), octobre 1967 – mars 1968 
Peinture émail à l’uréthane Bostik sur contreplaqué et acier, hélices d’avion, écrans de métal et moteurs électriques 26 panneaux de dimensions irrégulières montés en trois sections : 295 x 1551 x 25,5 cm; 295 x 1109,9 x 25,5 cm; 191,5 x 492,7 x 2,5 cm (longueur totale 32,2 m) 
Œuvre de commande du ministère des Transports du Canada réalisée pour l’aéroport international de Montréal à Dorval (Québec), fait partie de la collection du Musée des beaux-arts du Canada à Ottawa depuis 1998

Art Canada Institute, Greg Curnoe, Homage to the R 34, 1967-1968
Une des panneaux controversés de Hommage au R 34 contenant un extrait du livre WW I de Hanson W. Baldwin, qui comprend un compte rendu d’un témoin du bombardement d’une classe de maternelle à Londres par des bombardiers allemands Gotha, le 13 juillet 1917. Curnoe y a représenté l’artiste Tony Urquhart et son fils Marsh.

Hommage au R 34 est la plus grande des œuvres de Greg Curnoe. Conçue expressément pour le tunnel des arrivées internationales de l’aéroport de Montréal à Dorval, au Québec, elle est commandée dans le cadre d’un programme pour « décorer » les aéroports du pays. Le jury de cinq experts en art (dont fait partie Jean Boggs qui dirige à l’époque la Galerie nationale du Canada, aujourd’hui le Musée des beaux-arts du Canada) accepte la proposition de Curnoe de représenter en taille réelle les nacelles où prennent place les passagers et membres d’équipage sous le R 34, le premier dirigeable à traverser l’Atlantique sans escale en 1919. D’ailleurs, Curnoe a représenté le R 34 quelques années plus tôt dans Le piano camouflé ou Cocardes françaises, 1965-1966. On peut voir Curnoe en train de réaliser R 34 dans le film du même titre que lui a consacré son ami Jack Chambers (1931-1978).

 

L’œuvre comporte vingt-six panneaux, dont certains aux bords découpés, couverts d’aplats de couleurs vives évoquant les comics (comme c’est souvent le cas chez Curnoe), et surmontés de ses rayures caractéristiques. Les « passagers » dans les nacelles sont des amis, des membres de sa famille et son chat, juxtaposés à des personnages historiques canadiens comme le capitaine du R 34, le major G. H. Scott; Louis Riel, le chef de deux mouvements de résistance métis; et Paul Joseph Chartier, un désaxé qui a échoué dans sa tentative de faire sauter la Chambre des communes en 1966.

 

À l’époque, cette œuvre murale est choquante, surtout si on la compare aux tableaux abstraits commandés pour les autres aéroports auprès d’artistes établis, notamment Jean-Paul Riopelle (1923-2002), Ronald Bloore (1925-2009), Brian Fisher (1939-2012) et Fernand Leduc (1916-2014). Des plaintes de la GRC et d’employés de l’aéroport se mettent à fuser dès le début de son installation le 20 mars 1968. Les textes qu’elle comporte au sujet de Mohamed Ali (qui refuse d’être conscrit en 1966) et du bombardement d’une maternelle britannique pendant la Première Guerre mondiale, ainsi que la page du journal intime de Curnoe sont considérés comme antiaméricains ou inadéquats pour l’endroit. En outre, le personnage qui tombe de la deuxième nacelle, la main sectionnée par l’hélice, ressemble étrangement au président des États-Unis Lyndon Johnson, même si Curnoe prétend qu’il s’agit d’un voisin. Réalisée en pleine guerre du Vietnam, l’œuvre est selon son auteur un manifeste pacifiste. Quoi qu’il en soit, au bout de quatre jours de discussions, le jury recommande qu’elle soit retirée et entreposée à la Galerie nationale du Canada.

 

Par un caprice du destin, l’œuvre murale de Curnoe, qui fait partie de la collection du Musée des beaux-arts du Canada depuis 1998, est l’une des rares commandées dans les années 1960 pour les aéroports qui existe encore. Les autres ont connu les sorts les plus divers : vandalisme, disparition mystérieuse ou don à un gouvernement étranger. Le traitement réservé à Hommage au R-34 demeure un exemple flagrant de censure.

 

Art Canada Institute, Greg Curnoe, Homage to the R 34, 1967-1968

Détails de Hommage au R 34.

 

 

 

Télécharger Télécharger