Saint-Eustache, Québec 1905
Saint-Eustache, Québec, 1905, représente une ferme historique locale construite en 1823, située près de la rivière du Chêne, encadrée d’un bouquet d’arbres. Peinte à l’aquarelle, l’œuvre se distingue par l’utilisation habile d’une large gamme de verts pour rendre les variations subtiles du feuillage, de la lumière et des ombres. De l’œuvre se dégage l’impression générale d’un environnement rural luxuriant et d’une idylle pastorale. Brymner est un aquarelliste talentueux, accompli et reconnu lorsqu’il commence à travailler à Saint-Eustache. Des œuvres comme celle-ci témoignent de son aisance avec l’aquarelle et de son enthousiasme pour le paysage.
Au début des années 1900, Brymner peint plusieurs œuvres dans cette localité. Maurice Cullen (1866-1934), l’artiste avec lequel il entretient les relations de travail les plus étroites (ils voyagent fréquemment ensemble), y possède un atelier. La ville est bien située, à proximité de Montréal, et le peintre apprécie y passer du temps. Bien que les documents qu’il a conservés ne fournissent pas de détails sur les attraits de Saint-Eustache, ses œuvres suggèrent que les charmes de cette ville sont en partie imputables aux sujets ruraux qu’il y trouve, semblables à ceux qu’il a peints dans le Bas-Saint-Laurent. Il sait également que les sujets campagnards sont populaires dans les expositions canadiennes et que de nombreux artistes expérimentent le genre. Par exemple, en Ontario, Homer Watson (1855-1936) se spécialise dans de telles scènes, en plus d’être reconnu pour ses huiles.
Les œuvres de Brymner à Saint-Eustache représentent souvent des points de vue similaires. Une autre de ses aquarelles, Summer (Été), 1905, comme Saint-Eustache, Québec, est composé autour de la rivière, malgré que les deux œuvres la dépeignent sous des angles différents. Dans les deux œuvres, toutefois, le peintre établit un contraste marqué entre la magnificence des arbres et les bâtiments de la ferme tout comme il rend avec justesse les reflets complexes et délicats de l’eau.
En décembre 1905, Brymner présente ses aquarelles de Saint-Eustache dans le cadre d’une exposition collective, espérant les vendre – il comprend vite qu’il y a bel et bien un marché pour les paysages à l’aquarelle, qu’il s’agisse de représentations de l’Europe (comme il en a peintes) ou de scènes canadiennes. La pièce Cool Shades (Ombrage frais), v.1905, est décrite comme « un charmant bout de paysage à Saint-Eustache. La rivière au premier plan, le troupeau qui s’y abreuve, la ferme et la prairie au loin, le feuillage luxuriant des arbres et le bleu chaud intense du ciel – tout cela est rendu avec l’effet le plus heureux qui soit. » Cette description fait vraisemblablement référence à Saint-Eustache, Québec, et est révélatrice de ce que les critiques ont apprécié dans les paysages à l’aquarelle de Brymner.