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Danse 1998-2000

Danse

Tim Whiten, Danse, détail du joueur de tambour, 1998-2000

Pierre gravée au jet de sable, grandeur nature

Tree Museum, Gravenhurst, Ontario

Entre 1998 et 2000, Whiten produit une œuvre spécifique au site pour le Tree Museum, un vaste parc d’art situé près de Gravenhurst, en Ontario. Fondé en 1997 par l’artiste EJ Lightman (né en 1952), ancien élève de Whiten, le Tree Museum présente des installations d’artistes du Canada et d’ailleurs conçues in situ à partir de matériaux provenant de ce lieu. Pour créer Danse, l’artiste a gravé une image au jet de sable directement sur la surface exposée du Bouclier canadien. Il s’agit de la seule œuvre en plein air permanente réalisée par Whiten à ce jour.

 

Tim Whiten, Danse, détail du joueur de xylophone, 1998-2000, pierre gravée au jet de sable, grandeur nature, Tree Museum, Gravenhurst, Ontario.
Hans Holbein le Jeune, La vieille femme, tirée de la série La danse macabre, v.1526, publiée en 1538, gravure sur bois sur papier, 6,4 x 4,9 cm, The Metropolitan Museum of Art, New York.

L’iconographie de Danse reprend les motifs familiers de l’artiste : la rose et le crâne. La rose évoque les notions d’accomplissement spirituel, de perfection, d’achèvement et de passage de l’existence mortelle à la vie éternelle. Ici, douze roses sont disposées en deux constellations. La composition comprend également quatre figures squelettiques plus grandes que nature. Chacune joue d’un instrument de musique différent : un tambour, une trompette, une cornemuse et un xylophone. Les figures de Whiten sont inspirées d’une série de gravures sur bois miniatures réalisée par Hans Holbein le Jeune (1497/1498-1543) et intitulée La danse macabre, v.1526. Dans chaque gravure, comme dans La vieille femme, v.1526, la Mort prend la forme d’un squelette qui happe indistinctement les âmes de différents milieux, tout à la fois riches et pauvres, pieux et irrévérencieux.

 

Gravir la pente de ce territoire rocheux permet de découvrir peu à peu les squelettes de Whiten, chacun d’entre eux invitant à passer au suivant. Habilement articulés, leurs gestes jubilatoires sont animés par le jeu changeant de l’ombre et de la lumière sur les surfaces gravées, ainsi que par les veines entrecroisées du granit qui reproduisent leurs silhouettes.

 

Intégrant ces conditions élémentaires, les marques de Whiten sur le paysage rappellent les pratiques spirituelles vieilles de plusieurs milliers d’années, évoquant les rituels qui sous-tendent la réalisation des pétroglyphes. Elles rappellent également les formes fossilisées encastrées dans la surface de la terre, ponctuées par les mousses et les lichens maintenant nichés dans leurs crevasses. Ici, nous incarnons l’expérience du temps. La nature transitoire de la vie humaine est renforcée par la brièveté de la musique, symbolisée par les instruments portés par les squelettes de Whiten et associés à l’image d’un sablier. Cette temporalité s’oppose à la permanence du bouclier et aux mouvements imperceptibles du temps géologique. La configuration céleste des roses creusées au jet de sable dans la pierre souligne le cycle des saisons ainsi que les origines de la vie, nous rappelant que nous sommes, nous aussi, fait·es de « poussière d’étoiles ».

 

Danse est composée uniquement de roches précambriennes, l’ancien noyau géologique de l’Amérique du Nord. La pierre symbolise la survie, l’immortalité; en tant qu’« os de la terre, les roches restent à la fois l’hôte et le témoin des processus infinis de régénération ». Elles deviennent l’incarnation vivante des couches de conscience, des éléments vibratoires qui nous renvoient perpétuellement à un état d’être primordial, ce « il était une fois ».

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