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Paris/Ojibwa 2010

Robert Houle, Paris/Ojibwa, 2010

Robert Houle, Paris/Ojibwa, 2010

Installation multimédia

Collection de l’artiste

Paris/Ojibwa prend la forme d’un tableau qui est à la fois salon, théâtre et archives, et qui reformule l’histoire et la fonction des tableaux vivants. Avec un plancher de marbre surélevé en trompe-l’œil, une colonnade dressée, et quatre peintures à l’huile sur panneaux, l’œuvre rappelle les grands salons parisiens où les élites françaises se divertissaient. Sur le tiers supérieur de chaque panneau se trouvent des peintures de figures humaines — un danseur, un chaman, un guerrier et un guérisseur — portant des couvertures ou des robes de style gréco-romain, le dos au spectateur.

 

Eugène Delacroix, Cinq études d’Indiens Ojibwas, 1845
Eugène Delacroix, Cinq études d’Indiens Ojibwas, 1845, plume et encre brune sur vélin, 25,6 x 38,7 cm, Musée du Louvre, Paris.
Robert Houle, Étude pour Ojibwa allongé, 2006
Robert Houle, Study for Reclining Ojibwa (Étude pour Ojibwa allongé), 2006, graphite sur papier, 20,9 x 29,8 cm, collection de Barry Ace.

L’œuvre s’inspire d’une esquisse d’Eugène Delacroix (1798-1863), Cinq études d’Indiens Ojibwas, 1845, sur laquelle est tombé Houle. Delacroix y représente des membres d’une troupe de danseurs ojibwas itinérants dans divers états de repos. Au cours de ses recherches, Houle découvre que la troupe était composée de Mississaugas de la Première Nation de Walpole Island, située sur la voie navigable des Grands Lacs. Son installation ramène le spectateur à l’époque où ces danseurs ojibwas, dirigés par un homme nommé Maungwudaus, ont voyagé du Canada à Paris pour danser pour le roi Louis-Philippe et un public de quatre mille Français. Les apparitions des Mississaugas ont inspiré poètes, écrivains et peintres, dont Charles Baudelaire (1821-1867), George Sand (1804-1876) et Delacroix. Les noms de certains membres de la troupe de Maungwudaus se trouvent en haut des panneaux de la pièce de Houle.

 

Les lignes d’horizon au-dessus de la tête des personnages détournent la curiosité ethnographique et redirigent le regard sur leurs épaules. Alors que le ciel bleu de Warrior (guerrier) et Shaman (chaman) semble naturaliste, dans Healer (guérisseur) et Dancer (danseur), la zone est verte et orange, s’étendant au-delà des nuages et faisant allusion aux origines célestes des Mississaugas. Leur forme est douce, légèrement fragmentée, avec des panaches qui s’évanouissent dans le ciel. Ils font tous face à un horizon oriental, mais à l’extérieur de l’œuvre, dans les quatre directions sacrées. Chaque horizon a un repère physique : une vue de la prairie depuis le cimetière des Premières Nations de Sandy Bay, près du lac Manitoba. Une peinture abstraite évoquant la variole se trouve sur le tiers inférieur de chaque panneau.

 

Dans le cadre de l’exposition de Paris/Ojibwa, Barry Ace (né en 1958) a exécuté une danse traditionnelle à l’ouverture du Jardin des Tuileries, Place de la Concorde, et au Centre culturel canadien à Paris, en hommage aux danseurs qui l’ont précédé. Aussi, une animation, Uhnemekéka (Tonnerre), commandée par Houle et produite par le concepteur Web et mathématicien parisien Hervé Dagois, rassemblent des interprètes de la danse des clochettes qui semblent flotter dans un champ de couleurs. La danse des clochettes et la danse d’Ace sont toutes deux des danses de guérison.

 

Robert Houle, Paris/Ojibwa, figures sur le panneau : un chaman, un guerrier, un danseur et un guérisseur
Robert Houle, Paris/Ojibwa (détail), 2010, installation multimédia. De gauche à droite, les figures sur le panneau représentent un chaman, un guerrier, un danseur et un guérisseur.

 

Les danseurs de Maungwudaus se sont produits devant le peintre américain George Catlin (1796-1872), spécialisé dans les représentations de la vie quotidienne des autochtones vivant à la frontière, et ils ont fait partie de la Galerie indienne de Catlin, le peintre reconnu pour ses représentations de ce qu’il considère comme une culture ancienne et en voie de disparition d’une race dont il pressent la fin. Les Ojibwas que Houle dépeint font face à leur patrie ancestrale à partir d’un cimetière de l’autre côté de l’océan. Houle transporte leur histoire jusqu’à nos jours. Ses recherches dans les journaux de Maungwudaus et sa création de Paris/Ojibwa redonnent vie aux formes des danseurs de Mississauga, rendant possible leur retour spirituel transatlantique de Paris à sa maison de Sandy Bay, une métaphore de l’île de la Tortue.

 

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