Vers la fin d’un jour d’orage 1884
Vers la fin d’un jour d’orage est un exemple magnifiquement accompli de la capacité de Watson à peindre les effets atmosphériques créant l’ambiance et l’unité qui enracinent ses paysages dans l’expérience vécue des lieux familiers — une qualité qui a apporté à l’artiste le succès critique et populaire pendant une grande partie de sa longue carrière. En même temps, l’œuvre s’éloigne des effets relativement dramatiques de L’approche de l’orage dans les Adirondacks, 1879, notamment par la transition d’une nature sauvage impressionnante, avec un ours, à un paysage à échelle humaine qui met en scène, au lendemain d’une violente tempête, la présence rassurante d’animaux de ferme.
Comme L’approche de l’orage dans les Adirondacks quelques années plus tôt, Vers la fin d’un jour d’orage rappelle les paysages romantiques de la Hudson River School que Watson a sûrement vus pendant son séjour à New York dans la seconde moitié de la décennie 1870. Plus particulièrement, cependant, sa juxtaposition d’un ciel tumultueux et d’un paysage à l’échelle humaine, et sa poétisation du paysage comme s’il s’agissait d’une métaphore au sens profond, suggère l’influence de George Inness (1825-1894). Il est peu probable que les deux artistes se soient rencontrés, bien que Watson ait pu voir les œuvres de Inness à New York. Quoi qu’il en soit, les peintures de Inness, comme The Rainbow (L’arc-en-ciel), v.1878-1879, mettent l’accent sur des effets atmosphériques saisissants et présentent des arrangements compositionnels qui préfigurent Vers la fin d’un jour d’orage de Watson, même si les émotions évoquées dans les deux tableaux sont très différentes.
Pour la plupart des spectateurs et des critiques cependant, Vers la fin d’un jour d’orage semble avoir été comprise moins en termes de peinture américaine contemporaine que dans le contexte de l’art des peintres de Barbizon qui ont travaillé en France pendant les quatre décennies autour du milieu du siècle. Certes, le travail de ces peintres qui représentent des paysages familiers de façon poétique mais sans sentimentalité — comme dans The Storm (L’orage), 1872, de Narcisse Díaz de la Peña (1807-1876) — compte un vaste public en Amérique du Nord. Au Canada, des artistes aussi divers que Wyatt Eaton (1849-1896), William Brymner (1855-1925) et Horatio Walker (1858-1938) sont sensibles au style de Barbizon qui est admiré par d’importants collectionneurs. En effet, lorsque Watson révèle Vers la fin d’un jour d’orage dans le cadre de l’exposition de 1884 de l’Académie royale des arts du Canada (ARC), les critiques des journaux manifestent leur approbation par des expressions semblables à celles qui sont habituellement employées pour faire l’éloge de l’esthétique de Barbizon. Le chroniqueur du journal The Week de Toronto, par exemple, décrit l’œuvre comme un « remarquable [spécimen] de son style, fort, fidèle et avec de bons effets atmosphériques ». Il n’est donc pas surprenant que le tableau trouve rapidement un acheteur : l’homme d’affaires, politicien et philanthrope Edmund (E. B.) Osler, l’un des clients les plus généreux et les plus réguliers de Watson à Toronto.