Cycle crétois 2, no 3 1985
Faisant partie d’une série regroupant une vingtaine d’œuvres créées de 1983 à 1985, Cycle crétois 2, no 3 est un assemblage de forme irrégulière, sans cadre, accroché directement au mur. Des fragments de toile grossièrement peinte dans les tons de brun, de gris et de bleu, sont cousus ensemble et juxtaposés d’une manière qui suggère des plaques tectoniques. Une figure cornue, mi-homme, mi-animal, semble danser, ou alors elle est peut-être en transe, au sein du paysage accidenté, texturé, de la toile. Devant elle encore, sept serpents se dressent sur leurs queues, comme s’ils étaient charmés. Dans le coin supérieur gauche de la toile, une large surface bleue suggère l’eau ou le ciel.
Cette série marque le retour à la figuration chez Sullivan qui s’y consacre après un séjour d’un an (1983-1984) en Crête. Elle y a connu les ruines et les sculptures antiques, ainsi qu’un paysage desséché et stérile, qui ont éveillé son imagination et renouvelé son intérêt pour les forces primales et le mythe qui ont ponctué sa pratique artistique depuis ses premières peintures comme Tête amérindienne I, 1941, jusqu’au photomontage Rencontre avec Apollon archaïque, 1974.
Un univers mythique complexe se déploie à travers toute la série Cycle crétois, 1983-1985, ce qui est particulièrement saillant dans Cycle crétois 2, no 3. Les motifs se répètent d’une peinture à l’autre. Sullivan y combine la figure bestiale cornue avec des oiseaux, des serpents, des rivières et des montagnes pour évoquer des mythes de création, des moments méditatifs, ou des rituels secrets. Elle ne représente pas d’histoires mythiques, elle invente plutôt des mises en situation de prière, de sacrifice ou de conflit, suggérant des moments où les Crétois de l’Antiquité auraient pu invoquer l’intervention divine.