Aeris Ludus 1967
Au milieu des années 1960, Sullivan entreprend des expérimentations sculpturales en mouvement. Accrochée au-dessus du sol par des câbles qui tendent à disparaître dans la lumière, Aeris Ludus comprend des formes circulaires et carrées qui se balancent dans le vent d’une manière qui évoque la danse et qui tintent quand elles entrent en collision. L’effet dynamique est accentué par l’apparente dissonance entre l’énorme base d’acier, rouge vif et asymétrique, et la structure supérieure plus légère de laquelle les formes, sans poids apparent, pendent dans le vide. Contrairement aux œuvres sculpturales précédentes de Sullivan, comme Chute concentrique, 1962, et Callooh Callay, 1967, Aeris Ludus ne fait pas que suggérer le mouvement. C’est une sculpture cinétique. Toutefois, elle demeure fort différente des œuvres cinétiques mécanisées produites dans les années 1960 par Nicholas Schöffer (1912-1992), ou les structures activées par le vent de George Rickey (1907-2002), qui suivent des trajectoires régulières. Dans le travail de Sullivan, le mouvement est irrégulier et imprévisible et rappelle ses improvisations de danse.
Le caractère ludique de l’œuvre — son titre traduit du latin signifie « jeu aérien » — est en opposition totale avec les matériaux industriels dont elle est faite, ainsi qu’avec les techniques de soudure que Sullivan utilise dans sa création. Cette légèreté révèle combien Sullivan se détache du sérieux et de l’effet hard-edge de l’esthétique de la machine et du minimalisme, deux courants visant à limiter la subjectivité de l’artiste, et qui étaient dominants dans la sculpture au Québec dans les années 1960, particulièrement avec les œuvres d’Ulysse Comtois (1931-1999), de Pierre Heyvaert (1934-1974) et d’Yves Trudeau (1930-2017).
Aeris Ludus a été présentée en 1967 dans le cadre de Sculpture ’67, une exposition en plein air organisée par le Musée des beaux-arts du Canada dans le contexte des célébrations du Centenaire du Canada, et tenue dans le Nathan Phillips Square, près de l’Hôtel de ville de Toronto. Plus tard, l’artiste en a fait don au Musée d’art contemporain de Montréal.