Femme en deuil 1997
Oviloo Tunnillie a commencé à créer des sculptures de femmes en pleurs ou en deuil à la fin des années 1990. Sa fille de treize ans, Komajuk, s’est suicidée en 1997. La jeune fille s’est discrètement enlevé la vie dans un placard de chambre à coucher pendant que le reste de la famille, inconscient de ce que faisait cette enfant, regardait la télévision dans une autre partie de la maison. Femme en deuil est la première sculpture qu’Oviloo a créée en réaction directe à ce drame personnel. Cette œuvre tranquille exprime un profond chagrin par le biais du langage corporel du personnage féminin. La femme drapée dans une longue robe s’avance lentement, la tête inclinée, une main pressée sur le front. Aucune expression faciale n’est nécessaire pour lire l’angoisse du personnage.
La forme simplifiée du personnage et son visage caché sont typiques des œuvres tardives d’Oviloo, où le chagrin devient une émotion centrale, reflétant les drames familiaux qui ont marqué ces années. Son père bien-aimé Toonoo (1920-1969) a été tué par son gendre Mikkigak Kingwatsiak dans un accident de chasse présumé, en 1969. Mais seulement quelques années avant le suicide de sa fille, le choc et la tristesse de la mort de son père ont été ravivés en 1994, quand Mikkigak, se croyant sur le point de mourir d’une maladie, a confessé avoir assassiné Toonoo.
Si d’autres artistes inuits tels que Shuvinai Ashoona (née en 1961) ont traité de la perte dans leur travail — particulièrement en rapport au suicide, une question sociale cruciale pour les communautés inuites — peu ont exploré l’expérience intérieure du chagrin. Oviloo et son frère Jutai Toonoo (1959-2015) demeurent deux des rares exemples d’artistes inuits dont le travail met l’émotion au premier plan et le récit au second. Dans l’œuvre tardive d’Oviloo Crying Woman (Femme en pleurs), 2000, le sujet nu se tient la tête dans les bras, qui reposent sur ses genoux repliés. Il s’agit d’une image introspective de vulnérabilité totale. La femme est dessinée seule, mentalement et physiquement. Dans une autre œuvre, Repentance (Repentir), 2001, le chagrin de la femme explose en une frénésie d’émotions. Dans toutes ces sculptures, l’émotion est exprimée à travers le langage corporel des figures féminines.