Oiseaux jaunes vers les années 1960
Cette composition de trois oiseaux environnés de fleurs est atypique dans l’œuvre de Maud Lewis, mais elle correspond au type d’imagerie que l’artiste préférait pour la décoration intérieure de sa maison. Elle donne plus à penser à la contre-porte décorée de la maison par exemple qu’à n’importe lequel de ses paysages. Le motif floral est résolument plat et évoque le papier peint ou les motifs d’un tissu. Il n’y a certainement pas d’ombres ici et il n’y a pas davantage de profondeur de champ, tout est inscrit en surface. Si cette œuvre est liée à d’autres de Lewis, c’est par sa parenté avec l’image récurrente des trois chats noirs, soit une chatte et deux chatons, présentés sur un terrain plat, entourés de fleurs. À l’instar des chats, Oiseaux jaunes est devenue l’une des images les plus reproduites de Lewis.
Ici, les fleurs éclatantes sur les branches enchevêtrées créent un écran à l’avant-plan pour soutenir les oiseaux, de toute évidence des chardonnerets au corps jaune, et aux ailes et à la tête noires. (Les têtes noires indiquent qu’il s’agit de chardonnerets mâles qui souvent, lorsque les petits arrivent à la taille de ces oisillons, assument la responsabilité alimentaire à la place de la mère.) Habituellement, les tableaux de Lewis présentent une vue plus large, montrant davantage le paysage, tandis qu’ici, c’est une scène qu’elle aurait pu observer de près, peut-être aux abords de son propre jardin. Comme Lance Woolaver l’écrit, « Maud se réjouit de peindre des pois de senteur, des tulipes et des roses. Le retour de ces oiseaux chanteurs sur les pommiers en floraison constitue un événement qui mérite d’être consigné ».
On ne compte pas de multiples versions de ce tableau puisqu’il n’était pas populaire à l’époque. C’est regrettable, car pour l’œil contemporain du moins, son exubérance et sa gaieté en font l’une des images les plus puissantes de Lewis. Oiseaux jaunes est aussi l’une de ses images les plus largement commercialisées, apparaissant sur des couvertures de livres et des biens de consommation comme des tasses et des t-shirts. Au Musée des beaux-arts de la Nouvelle-Écosse à Halifax, il y a même une « station à égoportrait » où les visiteurs peuvent se photographier au cœur d’une version agrandie de cette œuvre.