Chinook 1945
Dans le style naturaliste qui marque les premières années de sa carrière, cette peinture de Marion Nicoll représente un sujet qu’elle connaît bien pour avoir grandi en Alberta : le vent chaud et sec connu sous le nom de chinook. Un arc proéminent de violets et de gris tracé dans le quart supérieur de la composition illustre l’effet atmosphérique causé par les courants d’air chauds et humides provenant du Pacifique, qui soufflent, se réchauffent et s’assèchent dans les contreforts des Rocheuses. La lumière jaune qui domine la scène évoque la chaude température du chinook, un jour de fin d’été après la récolte. On entre dans la composition par les rangées de plants lumineux du premier plan, qui attirent l’œil et le mènent vers le centre du tableau, où l’un des chevaux est rendu en relief contre la meule de foin vivement éclairée par le soleil. Le regard s’arrête enfin sur le ciel irradiant à l’arrière-plan. Chinook est l’une des rares œuvres connues que Nicoll réalise à la tempera; ce choix de matière au détriment de l’aquarelle est significatif, car la peinture opaque plus épaisse enrichit les couleurs et la luminosité de la scène.
Nicoll fait souvent des esquisses en plein air dans les contreforts de l’Alberta. Ses dessins préliminaires pour Chinook révèlent le soin avec lequel elle organise sa composition. Le plus simple des plans montre une configuration circulaire entre deux chevaux qui broutent paisiblement dans le coin inférieur gauche, leur crinière flottant au vent. Les poteaux de clôture verticaux dominent le côté droit. La deuxième esquisse, se rapprochant davantage du tableau fini, porte une attention soutenue à l’arc du chinook et aux motifs verticaux formés par les traverses et les poteaux de la clôture. Le tableau définitif rassemble les idées de ces esquisses, mais avec un cheval supplémentaire créant un point focal plus fort au milieu du champ.
Tout au long de sa pratique, elle reste très consciente des effets atmosphériques changeants au fil des saisons, des mois et des jours de l’année. Ces thèmes influencent ses peintures abstraites ultérieures, notamment la série Chinook (I-IV), 1963-1966. Cette œuvre est également l’une des premières à arborer sa signature distinctive, « M. Nicoll », qu’elle utilisera pour le reste de sa carrière. Cette identité neutre lui permet de rester anonyme sur les formulaires de candidature aux expositions, à une époque où la plupart sont jugées par des artistes masculins.