Divan moelleux avec complet 1986

Divan moelleux avec complet de Gathie Falk est une grande peinture qui mesure deux mètres de large et dont la quasi-totalité de la composition est occupée par un divan rose saumon au tissu orné d’un motif décoratif flou mais saillant. Des formes jaune doré s’étendent sur le devant de chacun de ses bras – imitant sans doute des incrustations en bois – et l’arrière-plan contre lequel il est posé semble reconstituer un extérieur : on discerne une étendue bleue, possiblement un plan d’eau, puis à l’arrière, du vert qui rappelle une pelouse. Devant le divan se trouve un petit arbuste élancé. C’est toutefois un complet gris pour hommes qui partage la vedette avec la pièce de mobilier. Vu la manière dont il est suspendu à une corde à linge placée au-dessus du divan, il donne l’impression d’être assis.

Par le thème des chaises en bois abordé dans la série Chairs (Chaises), 1985, Falk s’attarde aux délicats entrelacs de l’ombre et de la lumière. Quant à Soft Chairs (Fauteuils), la série sur laquelle elle se concentre en 1986, elle constitue une exploration non seulement du volume sculptural des meubles rembourrés, mais aussi des connotations symboliques de leurs formes moelleuses et confortables. Falk témoigne : « Tout le travail de dentelle sur les pattes et les dos ont sans doute poussé mon inconscient à diriger mes efforts vers un objet plus volumineux. Pendant la peinture des quarante chaises, l’image floue et volumineuse est devenue le fauteuil fortement sculpté. »

La série Fauteuils, à l’instar de Chaises, rappelle Home Environment (Environnement domestique), 1968, l’œuvre ayant permis à Falk de percer. Elle indique que la série provient d’abord d’une image floue dans sa tête. Avec le recul, elle comprend que les meubles rembourrés incarnent la trame narrative de la classe ouvrière qui aspire à posséder des meubles représentant le confort et la stabilité financière. Elle note que, « par-dessus tout, ce complet dans la salle de séjour signifie qu’un père occupe le foyer ». En effet, l’habit à rayures, paraissant se reposer dans Divan moelleux avec complet, est un indice de présence paternelle soulignant la notion de sécurité économique du ménage.

Même si la série Fauteuils peut être clairement interprétée dans le cadre narratif de la domesticité et de la dépendance financière, il ne faut également pas négliger « l’image floue et volumineuse » apparue dans l’esprit de Falk avant même que le fauteuil devienne son sujet. Comme le dit la critique d’art Robin Laurence dans « To Be a Pilgrim », en paraphrasant une affirmation non datée de l’artiste : « [Falk], pour des raisons qu’elle ne peut pas complètement s’expliquer, est “ravie” par la présence volumineuse des buissons, des haies et des arbres […] “Je suis attirée par la masse […] Par le poids important, la grosseur, la forme”. »