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Relief structuriste quadriplan nos 1-3 1989-1996

Relief structuriste quadriplan nos 1-3 [Série écran de rivière]

Eli Bornstein, Quadriplane Structurist Relief Nos. 1–3 (Relief structuriste quadriplan nos 1-3), de la série River-Screen (Écran de rivière), 1989-1996

Émail acrylique sur aluminium et Plexiglas, 60,4 x 137,8 x 14,6 cm chacun

Collection de l’artiste

 

L’image ci-dessus rassemble les œuvres de la série River-Screen (Écran de rivière) d’Eli Bornstein (de gauche à droite) : Quadriplane Structurist Relief No. 1 (Relief structuriste quadriplan no 1), Quadriplane Structurist Relief No. 2 (Relief structuriste quadriplan no 2), et Quadriplane Structurist Relief No. 3 (Relief structuriste quadriplan no 3), photographie de Roald Nasgaard.

À la fin des années 1980, à la suite de ses expériences dans l’Arctique, Bornstein commence une nouvelle série de reliefs quadriplans et hexaplans orientés horizontalement, qui représentent, avec leur étendue et leurs intonations résonnantes, l’un des points culminants de sa longue et créative carrière.

 

Dans les trois parties de Relief structuriste quadriplan nos 1-3, de la série Écran de rivière, une séquence de plans de couleur avance de gauche à droite et évoluent des verts de la lumière du jour aux bleus et aux violets de la fin du crépuscule. Scrutant l’horizon en le balayant de manière panoramique, les plans de couleurs zigzaguent et sautent comme de petites coupures dans la ligne du temps. Les articulations du premier plan sont dispersées d’un trait rythmique, ce qui incite l’œil à rechercher leurs couleurs et leurs formes individuelles, et à explorer leurs positions, leurs angles et leurs relations lorsqu’elles captent la lumière et projettent des ombres. Elles circulent dans l’espace et dans le temps, comme une progression d’accords musicaux entrecoupés de notes de grâce et de pauses. Derrière elles, les couleurs du fond déploient leur quiétude et leur plénitude, comme pour faire allusion à une existence plus vaste, bien au-delà de leurs extrémités. Au-devant, la vie naturelle et transitoire continue d’effectuer ses danses éphémères tandis que les plans de couleur eux-mêmes maintiennent l’œil dans un état de suspension au sein d’un espace intemporel.

 

Bornstein fait toujours attention aux titres, préférant les chiffres aux noms descriptifs, afin de dissuader le public d’y voir des références représentationnelles avant d’explorer les relations structurelles (les descriptions qu’il utilise – quadriplan, hexaplan et double plan – font référence au nombre de plans dans la construction de chaque relief). Or, il arrive que les sous-titres, comme ceux de la série Écran de rivière, nous servent de point d’ancrage. L’artiste lui-même décrit ainsi les sources naturelles des éléments formels de la série :

 

Tandis que je marche chaque jour sur la rive… Ma rivière est comme un ruban qui se déploie ou un écran de couleur qui reflète la lumière constamment changeante du ciel et la position du soleil. De jour comme de nuit, tout au long des changements de saison, j’observe une transition continue des couleurs, des verts aux bleus vert, aux verts bleu, aux bleus intenses, aux bleus violets et aux violets profonds. Il y a des gammes d’intensité et de valeur, ainsi que des transitions et des fusions de l’une à l’autre, le long de cette étendue horizontale de couleur. Aucune couleur du spectre entier n’est pas parfois visible ici. Aucun artiste ne peut inventer une couleur que cette bande de miroir chromatique ne peut refléter.

 

Harald Sohlberg, Winter Night in the Mountains (Nuit d’hiver dans les montagnes), 1914, huile sur toile, 160 x 180,5 cm, Nasjonalmuseet, Oslo.

Le triptyque est un tour de force célébrant la nature : la gloire d’un lever de soleil matinal, la verdure du printemps ou la mélancolie du jour qui s’éteint. À la fin du dix-neuvième siècle, les Scandinaves désignent cette dernière sous le nom de « l’heure bleue », soit le crépuscule pendant lequel leurs méditations peuvent s’élever jusqu’au ravissement quasi mystique. D’ailleurs, les reliefs de Bornstein sont imprégnés par la « Nature » (avec une majuscule initiale, comme l’artiste l’a souvent écrit).

 

Les reliefs multiplans de Bornstein sont en quelque sorte des descendants involontaires de la tradition du paysage symboliste nordique, née dans les années 1890 d’une confrontation renouvelée avec la nature sauvage nordique à une époque de malaise spirituel de fin de siècle. Insatisfaits du réalisme objectif des peintures impressionnistes, des artistes – par exemple le Norvégien Harald Sohlberg (1869-1935) – commencent à explorer derrière les apparences et à méditer sur l’esprit intérieur de la nature. « La vie éternelle est ressentie partout dans l’action de la nature », écrit le peintre finlandais Akseli Gallen-Kallela (1865-1931) qui, avec ses collègues paysagistes nordiques, abandonne la représentation réaliste pour concevoir de nouvelles structures picturales qui résonnent, pour ainsi dire, avec la vie de l’âme.

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