Vallée de la rivière Bow au-dessus de Revelstoke 1938
Cette œuvre est une représentation fascinante des montagnes Rocheuses qui s’étendent sur la vallée de la Bow et la rivière qui la traverse. Avec son horizon surélevé et son point de vue en hauteur, le cadrage rend claustrophobe, confinant l’œil à l’intérieur de l’image plutôt que de lui laisser libre parcours. Comme pour View from the Toronto General Hospital (Vue de l’Hôpital général de Toronto), 1931, il s’agit d’une application classique de la perspective atmosphérique.
McCarthy produit des croquis de cette scène lors de son premier voyage dans l’Ouest canadien en juillet 1937. Elle se rend à Jasper, séjourne au lac Edith, puis va au lac Maligne et à Prince Rupert, où elle monte à bord d’un bateau pour longer la côte vers le sud jusqu’à Vancouver. Enfin, elle campe dans les Rocheuses, au mont Revelstoke.
La façon dont McCarthy emploie la couleur fascine, car elle n’est pas réaliste. Au contraire, son choix de couleurs est rythmique, avec des bruns et des ocres au premier plan, un vert bleuté au centre gauche et un rouge rouille (un mélange de terre de Sienne brute et brûlée) à droite, lequel s’estompe et se transforme en ocre clair à l’arrière-plan. Les formes sont disposées de manière à compléter les couleurs. Le regard peut alors continuer à suivre la rivière jusqu’à l’arrière-plan ou remonter la pente sur la droite jusqu’au sommet, avant de redescendre vers le fond de la toile. L’œil zigzague doucement de l’avant vers l’arrière.
McCarthy apprend cette technique de va-et-vient auprès de Hortense Gordon (1886-1961), qui lui enseigne au Ontario Training College for Technical Teachers à Hamilton. Comme McCarthy le note dans son autobiographie : « [Gordon] enseignait que le principe fondamental du rythme était le changement séquentiel ordonné : de la direction, en permettant par exemple aux troncs d’arbres d’un bosquet de varier subtilement dans leur inclinaison par rapport à la verticale; de la taille […]; de la forme […]; de la tonalité […]; et ainsi de suite avec la couleur et la texture. N’importe quels éléments d’un projet peuvent être mis en harmonie par la création d’une étape à mi-chemin entre les deux. Pour moi, c’était la lumière qui brillait dans l’obscurité. »
Comme McCarthy le fait souvent remarquer, Gordon est pratiquement la seule à lui avoir enseigné la composition, où le principe du rythme constitue un élément clé – quelque chose qu’elle estime n’avoir jamais correctement appris au Ontario College of Art (aujourd’hui l’Université ÉADO).