L’histoire de l’art à Halifax ne suit pas le cours d’une progression régulière, mais est plutôt jalonnée par des évolutions en dents de scie, dictées par les circonstances et alimentées par les efforts de groupes d’action civique dévoués. Autrefois capitale d’une colonie britannique et aujourd’hui capitale d’une province canadienne, Halifax est une ville en mouvement. Port militaire et commercial, siège de cinq universités majeures, elle se caractérise par les allées et venues de régiments, de gouvernements et de communautés réfugiées, immigrantes ou étudiantes. Il semble souvent que la ville n’est pas tellement enracinée, mais qu’elle est plutôt amarrée – en sécurité, mais toujours secouée par le temps et les marées. Fondée en tant qu’avant-poste militaire, Halifax a toujours semblé être sur la défensive sur le plan culturel, ses institutions artistiques permanentes mettant longtemps à voir le jour. Par exemple, l’école d’art de la ville est fondée 140 ans après la ville elle-même, et le Musée des beaux-arts de la Nouvelle-Écosse n’ouvre ses portes que 225 ans après l’arrivée des premières vagues de colonisation européennes à Kjipuktuk. Pourtant, depuis plus de 200 ans, on trouve des associations et des institutions artistiques à Halifax. C’est peut-être la mutabilité même de la ville qui est à l’origine des changements soudains et des actes de foi transformateurs qui ont donné naissance aux communautés artistiques riches et diverses qui l’animent aujourd’hui.
1787 : Le Halifax Chess, Pencil and Brush Club
La première association artistique répertoriée en Amérique du Nord britannique est le Halifax Chess, Pencil and Brush Club, fondé en 1787 et actif pendant trente ans. Le club voit le jour pour « promouvoir le dessin et l’aquarelle (ainsi que les échecs) en tant que divertissements de bonne société ».
Parmi les importants membres fondateurs du club, on trouve Richard Bulkeley (1717-1800), arrivé en Nouvelle-Écosse en 1749 en tant qu’aide de camp d’Edward Cornwallis (1713-1776), et qui s’avérera le fonctionnaire le plus influent de Halifax jusqu’à sa mort en 1800. Outre ses responsabilités administratives, judiciaires et militaires, Bulkeley est également le premier mécène de la ville et un artiste amateur. Le Musée de la Nouvelle-Écosse conserve un autoportrait de Bulkeley, que le conservateur et historien de renom Harry Piers (1870-1940) a qualifié, en 1914, de « représentation de lui-même à la craie, misérablement exécutée, avec les jambes écartées ». Les critiques ultérieures ne sont pas aussi sévères. Ainsi, selon Dianne O’Neill (née en 1944), « il semble avoir saisi en quelques traits habiles le détachement nonchalant et sophistiqué d’un homme conscient de la vie cultivée qu’il a laissée derrière lui, à Dublin et à Londres, mais fier de ce qu’il a accompli dans son nouveau pays ».
1830 : L’exposition d’art au Dalhousie College et les autres expositions initiales
La première exposition d’art publique au Canada atlantique, revendiquée comme « la première exposition publique de tableaux jamais organisée en Amérique du Nord britannique », se tient au Dalhousie College, du 10 au 29 mai 1830. Organisée par le professeur de dessin et de peinture de l’établissement, W. H. Jones (actif au Dalhousie College en 1829-1830), l’exposition compte de ses œuvres, de même que celles de ses élèves et d’autres artistes de la région, amateurs et de profession. Y figurent également des œuvres d’Europe et des États-Unis provenant de collections privées locales, ce qui deviendra une formule récurrente des expositions tenues dans la ville jusque dans les années 1940.
En 1848, le Halifax Mechanics’ Institute organise une vaste exposition d’art publique, qui se déroule selon le même programme et qui sera suivie d’autres éditions similaires, notamment la deuxième exposition annuelle de l’Académie royale des arts du Canada (ARC), tenue en 1881 à Province House, le siège du gouvernement de la Nouvelle-Écosse. Toutefois, le faible nombre de ventes décourage l’Académie de présenter l’événement à Halifax de nouveau. Lors de l’inauguration de l’exposition, le gouverneur général, le marquis de Lorne (1845-1914), prononce un discours dans lequel il souligne l’importance de doter Halifax d’une école d’art locale. Ces remarques sont reprises tout au long de la décennie et inspirent un groupe de philanthropes de la ville qui cherchent à concrétiser ce projet. Au cours des premières années de la décennie, plusieurs événements sont organisés pour sensibiliser à la création d’une école d’art à Halifax et recueillir des fonds, notamment une exposition d’œuvres d’art et de manuscrits asiatiques prêtés par Anna Leonowens (1831-1915), l’une des fondatrices de la Victoria School of Art and Design (VSAD).
1831 : Le Halifax Mechanics’ Institute et le Musée de la Nouvelle-Écosse
Le Halifax Mechanics’ Institute est fondé en 1831 en tant que centre d’éducation publique et « d’amélioration culturelle ». Son programme est composé de conférences sur l’appréciation de l’art, de cours d’art et d’expositions itinérantes et locales, y compris la grande exposition de 1848 qui présente des œuvres issues de collections locales. L’établissement dispose également d’une bibliothèque de prêt et est ouvert aux membres de tous les secteurs de la société haligonienne.
En 1868, le Halifax Mechanics’ Institute et le Nova Scotia Institute of Science (fondé en 1862) deviennent le Musée de la Nouvelle-Écosse, qui entreprend de constituer une collection d’œuvres d’art dans le cadre de son mandat de musée d’histoire générale. Au début du vingtième siècle, son deuxième conservateur, Harry Piers (1870-1940), mène des recherches exhaustives sur les artistes en activité dès les débuts de la colonie en Nouvelle-Écosse; son ouvrage Artists in Nova Scotia (publié dans les Collections de la Nova Scotia Historical Society en 1914) constitue la première tentative de présenter une histoire de l’art complète de la province.
1887 : La Victoria School of Art and Design
De nombreuses écoles d’art informelles voient le jour à Halifax, la première connue datant de 1809, lorsque John Thomson, un peintre de portraits et de miniatures, annonce ses services en tant qu’instructeur d’art dans des maisons privées ou dans son atelier. À la fin des années 1800, l’absence d’école professionnelle pour la formation des artistes devient un sujet de conversation parmi les artistes et autres adeptes de l’éducation. En 1870, Forshaw Day (1831-1903), qui est peut-être alors l’artiste le plus en vue à Halifax, va jusqu’à proposer la création d’une école d’art au Nova Scotia Board of Education, mais sans succès. En 1881, le marquis de Lorne (1845-1914), gouverneur général de l’époque, inaugure l’exposition à Halifax de l’Académie royale des arts du Canada (ARC); dans son allocution, il souligne le manque d’une école d’art à Halifax.
Six ans plus tard, les premières mesures sont prises pour créer une telle institution, non par un groupe d’artistes, mais par le comité qui a organisé les événements de célébration du jubilé d’or de la reine Victoria et qui décide de poursuivre ces hommages. Le groupe monte une exposition et organise un gala de collecte de fonds, qui permet de réunir 1 600 dollars pour lancer la création d’une école nommée d’après la monarque. La Victoria School of Art and Design (VSAD) est créée en 1887 par ce groupe local d’activistes et de philanthropes, au sein duquel on compte Anna Leonowens (1831-1915).
Le premier directeur du collège est George Harvey (1846-1910), un peintre anglais qui immigre à Halifax en 1881 et présente des œuvres à l’exposition de l’ARC la même année. À ses débuts, l’école est petite et compte 75 élèves dans ses classes de jour (destinées aux artistes en herbe et aux enseignant·es), et 135 élèves dans ses classes du soir (conçues comme une formation continue pour les personnes travaillant dans le secteur industriel, commercial ou pratiquant l’artisanat; ces cours sont offerts gratuitement aux apprenti·es et aux « autres personnes désireuses de se préparer à des emplois dans l’industrie »).
En 1895, le titre de directeur est abandonné au profit de celui de recteur, rectrice et Katharine Evans (1875-1930) est engagée comme première femme à la tête de la VSAD. Elle est suivie en 1898 par le peintre Henry M. Rosenberg (1858-1947), qui est peut-être l’artiste le plus accompli à enseigner à l’école d’art jusqu’à l’arrivée de l’un de ses successeurs, Arthur Lismer (1885-1969), recteur de l’établissement de 1916 à 1919. Au cours de ces premières décennies, l’école compte peu d’élèves, parfois moins de vingt, et le recteur est souvent le seul membre du corps enseignant à temps plein. Le VSAD prend le nom de Nova Scotia College of Art (NSCA) en 1925, puis Nova Scotia College of Art and Design en 1969, avant de devenir l’Université NSCAD en 2003.
1908 : La Galerie d’art de la Nouvelle-Écosse
La Galerie d’art de la Nouvelle-Écosse (GANE) est fondée en 1908 par un groupe haligonien, dont font notamment partie Anna Leonowens (1831-1915) et Edith Smith (1867-1954), souhaitant créer un musée d’art dans la capitale de la Nouvelle-Écosse. Pendant plus de soixante ans, la GANE a du mal à réaliser ses ambitions, même si elle réussit à constituer une modeste collection et à organiser de nombreuses expositions. La personne à la tête de la Victoria School of Art and Design (VSAD, aujourd’hui l’Université NSCAD) est souvent également en charge de la GANE, tandis que l’école d’art entrepose parfois la petite collection de peintures, d’estampes et de sculptures du musée.
Au fil des décennies, la GANE collabore avec des institutions partenaires, telles que l’école des beaux-arts et la Nova Scotia Society of Artists (fondée en 1922, à l’origine en tant que division de la GANE), pour faire pression sur les gouvernements en vue de la construction d’un musée d’art spécialisé et pour collecter des fonds afin de soutenir un tel projet. La galerie d’art est également parmi les premiers groupes membres de la Maritime Art Association, mais sans espace d’exposition, elle ne peut contribuer à la circulation des expositions qui est la mission principale de l’association. La GANE vend des abonnements de différents niveaux, organise des réunions annuelles à Halifax et parraine des expositions à l’école des beaux-arts. En 1919, par exemple, Arthur Lismer (1885-1969), alors directeur du Nova Scotia College of Art and Design (NSCAD) et conservateur de la GANE, organise une exposition du peintre américain natif de la Nouvelle-Écosse Ernest Lawson (1873-1939). Cet artiste, membre du groupe postimpressionniste des États-Unis « The Eight », est né à Halifax et y revient souvent au cours des années 1910 et 1920. Lismer réussit à obtenir des fonds pour acheter six toiles de Lawson pour la collection de la galerie d’art.
En 1958, à l’occasion de son cinquantième anniversaire, la GANE organise une exposition aux Archives publiques, à partir des œuvres de sa collection. L’année suivante, le premier ministre de la Nouvelle-Écosse, Robert Stanfield (1914-2003), annonce que Lady Dunn, la veuve de Sir James Dunn (qui épousera bientôt Lord Beaverbrook), a l’intention de financer un musée d’art à Halifax. Des plans sont élaborés, un site est trouvé et Lord Beaverbrook est nommé codépositaire du musée, qui doit s’inspirer de la Galerie d’art Beaverbrook (aujourd’hui le Musée des beaux-arts Beaverbrook) de Fredericton. Le projet échoue cependant et aucun bâtiment n’est finalement construit. Selon l’historienne Sandra Paikowsky, les gouvernements de la ville et de la province ont peut-être hésité à supporter les coûts de fonctionnement d’un musée d’art. Compte tenu de l’histoire ultérieure de la quête d’un lieu construit dans le but d’accueillir un musée d’art à Halifax, cette hypothèse semble probable.
Ce n’est qu’en 1968 que la GANE ouvre son propre espace, la Centennial Art Gallery, située dans le lieu historique national de la Citadelle de Halifax. Cet espace d’exposition présente tant la collection de la galerie d’art que des expositions temporaires montées par une petite équipe, dont le conservateur, Bernard Riordon (né en 1947). La GANE exploite cette galerie d’art pendant dix ans, jusqu’en 1978, date à laquelle le bâtiment est rétabli à son état historique.
C’est progressivement et par étapes que le NSCAD quitte ses locaux de Coburg Road, en bordure du campus de l’Université Dalhousie. Le collège libère la Anna Leonowens Gallery, que la GANE s’approprie en 1975. Plus tard dans l’année, la galerie d’art est toutefois dissoute et ses actifs et collections sont absorbés par le Musée des beaux-arts de la Nouvelle-Écosse (MBANE), nouvellement créé par un décret ministériel, qui continue d’occuper l’ancien espace du NSCAD, alors propriété de l’Université Dalhousie.
1922 : La Nova Scotia Society of Artists
L’association artistique la plus importante pour l’art et les artistes de Halifax au début du vingtième siècle est la Nova Scotia Society of Artists (NSSA), fondée en 1922, suivie de près par la Maritime Art Association, fondée en 1935. La NSSA organise des expositions annuelles à Halifax pendant cinquante ans et, tout au long de son histoire, l’association défend avec vigueur la création d’un musée d’art permanent pour la Nouvelle-Écosse. Pendant des années, elle est la seule organisation de soutien aux artistes dans la province. Elle se dissout en 1974, car son mandat de société d’exposition semble de plus en plus anachronique dans une ville qui voit poindre un large éventail de galeries publiques.
Pendant un demi-siècle, les expositions les plus populaires à Halifax sont les expositions annuelles de la NSSA, qui se tiennent chaque année à partir de 1923. Elles permettent de dresser un bilan qui démontre une activité artistique d’une ampleur inégalée en Nouvelle-Écosse : plus de 4 000 peintures et autres œuvres d’art ont été exposées par 604 artistes sur une période de 50 ans. La première exposition est organisée à la Victoria School of Art and Design, puis les expositions ont lieu annuellement à l’école d’art jusqu’en 1933, date à laquelle l’événement est déplacé à l’hôtel Lord Nelson, nouvellement construit (et apparemment à l’épreuve du feu). Au cours des quatre décennies suivantes, l’exposition alterne entre l’hôtel Lord Nelson et la Halifax Memorial Library, puis elle revient à l’école d’art avant d’être inaugurée, à partir de 1967, à la Centennial Art Gallery et à la Galerie d’art de l’Université St. Mary’s.
1925 : Le Nova Scotia College of Art
L’école qui est aujourd’hui devenue l’Université NSCAD porte encore le nom de Victoria School of Art and Design quand Elizabeth Styring Nutt (1870-1946) arrive à Halifax, en 1919, pour remplacer Arthur Lismer (1885-1869) à la tête de l’institution. Comme Lismer, Nutt est diplômée de la Sheffield School of Art, bien qu’elle soit beaucoup plus conservatrice dans ses méthodes et ses attitudes que le futur membre du Groupe des Sept. Elle est engagée sur la recommandation de Lismer, malgré leurs divergences, car il la croit capable de travailler avec le conseil d’administration conservateur qui a fait échouer nombre de ses efforts pour faire progresser l’école d’art. Comme l’écrit John A. B. McLeish dans son étude sur Lismer, « [Nutt] avait, comme Lismer le savait, une personnalité d’une grande force et d’une grande fougue qui l’amènerait à accomplir, dans le domaine de l’enseignement des arts à Halifax, des réalisations qu’il n’avait lui-même pas été en mesure de mener à bien ».
Nutt dirige l’école d’art de main ferme jusqu’en 1943. En 1925, elle change le nom de l’école qui devient le Nova Scotia College of Art (NSCA), supprimant le terme « design » de sa dénomination, car, selon elle, « avec l’avancée du dernier quart de siècle, l’art est reconnu comme un tout, de sorte que le titre actuel est tout à fait inclusif ». Sous la direction de Nutt, l’école augmente ses effectifs et sa notoriété locale, mais demeure un bastion conservateur, éclipsé sur le plan artistique par le programme de l’Université Mount Allison à Sackville, au Nouveau-Brunswick, dirigé depuis 1935 par Stanley Royle (1888-1961), un ancien professeur du NSCA. Également diplômé de Sheffield, Royle est engagé par Nutt en 1931 et remercié par le NSCA en 1934 après s’être querellé à plusieurs reprises avec la rectrice au sujet de ses méthodes d’enseignement. Le fait qu’il reçoive une reconnaissance populaire et critique qui éclipse celle de Nutt a peut-être joué un rôle dans son départ.
Nutt prend sa retraite en 1943, mais ce n’est qu’en 1945 que son remplaçant permanent, Donald Cameron (D. C.) Mackay (1906-1979), est engagé, à la fin de son service en tant qu’artiste de guerre officiel canadien. Diplômé du NSCA, il a étudié avec Lismer à l’Université de Toronto. Ce dernier, consulté par le conseil d’administration du NSCA, a recommandé plusieurs personnes, mais Mackay ne faisait pas partie de ses choix. En effet, Lismer critique ce qu’il considère comme le conservatisme permanent de l’école des beaux-arts, notant que le NSCA est « complètement déconnecté de ce qui se passe aujourd’hui en enseignement des arts ». Il rejette la faute sur l’institution, et non sur les élèves : « Il y a beaucoup de talent, écrit-il, mais il est tué dès le départ par la formation. »
Lismer avait espéré une nouvelle direction plus novatrice, mais Mackay poursuit le programme conservateur de Nutt et renouvelle la tradition de l’école portée sur l’art commercial. Si Mackay est un artiste actif, il est peu connu au-delà de Halifax. Il enseigne également l’histoire de l’art à l’Université Dalhousie de 1938 à 1971 et est fait conservateur honoraire de la Galerie d’art de la Nouvelle-Écosse de 1945 à 1955. Mackay supervise de surcroît le déménagement du NSCA dans un nouveau bâtiment près du campus de l’Université Dalhousie en 1957. Comme sous la direction de Nutt, sous Mackay, le NSCA se concentre sur la peinture de paysage, les portraits et le design commercial.
1935 : La Maritime Art Association
Le premier magazine consacré exclusivement aux arts visuels est une revue trimestrielle lancée en 1940, intitulée Maritime Art: The Journal of the Maritime Art Association, qui propose des articles sur les arts dans le Canada atlantique, des entrevues et des comptes rendus d’expositions. Son éditeur, la Maritime Art Association (MAA), fondée cinq ans plus tôt, a pour mission de promouvoir l’art dans les provinces de l’Est. La MAA est fondée à l’initiative de Walter Abell (1897-1956), professeur d’histoire de l’art et conservateur à l’Université Acadia de Wolfville; le Nova Scotia College of Art et la Galerie d’art de la Nouvelle-Écosse comptent parmi les onze premiers groupes membres de l’association. Selon l’historienne Sandra Paikowsky, la MAA est « la première alliance régionale canadienne de clubs et de sociétés d’art, d’écoles publiques, d’universités, d’organisations sociales, de groupes de service et de groupes civiques, d’artistes, d’élèves en art et de toute autre personne intéressée par l’art ».
Le programme des expositions itinérantes est l’un des plus pérennes de l’association. Au moins huit expositions annuelles, souvent empruntées à la Galerie nationale du Canada (aujourd’hui le Musée des beaux-arts du Canada), circulent dans la région. La MAA organise également des expositions annuelles d’artistes de la région qui font la tournée des Maritimes. Paikowsky note que grâce à ces efforts, « la MAA crée une infrastructure pour la promotion et la diffusion de l’art dans les Maritimes ». Après sa disparition à la fin des années 1960, cette infrastructure est réinvestie par l’Atlantic Provinces Art Circuit (une association de galeries régionales pour la tournée de leurs expositions) et sa successeure, l’Atlantic Provinces Art Gallery Association.
La publication de Maritime Art est dirigée par le président de la MAA, Walter Abell, jusqu’en 1943, date à laquelle ce dernier la transfère à Ottawa sous l’égide de la Galerie nationale du Canada. Cette année-là, Maritime Art est rebaptisé Canadian Art. En 1967, le magazine change de nom pour devenir artscanada, et en 1983, il redevient Canadian Art. En 2021, le magazine cesse d’être publié.
1949 : 200 Years of Art in Halifax (200 ans d’art à Halifax)
En 1949, une exposition d’œuvres prêtées rappelant les premières expositions du dix-neuvième siècle est organisée en l’honneur du bicentenaire de Halifax. Puisant dans les collections privées et publiques de la ville, elle présente des œuvres remontant jusqu’à 1750, ainsi que de nombreuses œuvres contemporaines d’artistes vivant·es.
Organisée par des individus représentant la Nova Scotia Society of Artists, le Nova Scotia College of Art, la Galerie d’art de la Nouvelle-Écosse et l’Université Dalhousie, l’exposition prend place dans la nouvelle Queen Elizabeth High School. Il s’agit d’une occasion unique, comme l’indique le comité dans l’introduction du catalogue, « de remonter le temps et de retrouver un peu de la saveur du développement par étapes de la ville ». Le corpus de l’exposition est limité aux vues de la ville et du port, ainsi qu’aux portraits de personnes « natives, citoyennes ou célèbres, peintes dans la ville ». Malgré ces restrictions, l’événement dévoile 275 œuvres d’art et représente la plupart des figures les plus connues de l’histoire de l’art de la ville. Le comité obtient même le prêt d’un autoportrait de Gilbert Stuart Newton (1794 -1835) du Museum of Fine Arts Boston, malgré le lien ténu de l’artiste avec la ville (Newton est né à Halifax et y a vécu pendant son enfance, mais sa famille s’est établie à Boston en 1803, où il suit une formation artistique avec son célèbre oncle, Gilbert Stuart (1755-1828); il ne visitera jamais sa ville natale). Parmi les autres prêts notables, citons Elevator Court, Halifax (L’impasse du silo, Halifax), 1921, de Lawren S. Harris (1885-1970), du Musée d’art de Toronto (aujourd’hui le Musée des beaux-arts de l’Ontario) et Olympic with Returned Soldiers (L’Olympic avec des soldats rentrant au pays), 1919, d’Arthur Lismer (1885-1969), de la Galerie nationale du Canada (aujourd’hui le Musée des beaux-arts du Canada).
1953 : La Dalhousie Art Gallery
Dans les années 1970, Halifax compte cinq galeries d’art universitaires. La plus ancienne est la Dalhousie Art Gallery; créée en 1953, elle est aussi la première galerie d’art publique de la ville.
La Dalhousie Art Gallery a un impact immédiat sur Halifax, car pendant une décennie, elle est le seul lieu dédié aux expositions d’art. En 1955, la galerie inaugure sa série Know Your Artist (Connaissez votre artiste) avec une exposition individuelle de la peintre haligonienne Ruth Salter Wainwright (1902-1984). Premier programme de ce genre dans l’histoire de la Nouvelle-Écosse, cette série a pour but de présenter au public local des artistes de renom de la région. En 1956, le programme est élargi pour inclure une deuxième exposition collective d’artistes « jeunes et quelque peu révolutionnaires ».
Jusqu’en 1967, la Dalhousie Art Gallery est la seule galerie publique de Halifax. Malgré l’ouverture de la Centennial Art Gallery par la Galerie d’art de la Nouvelle-Écosse en 1967, la Dalhousie Art Gallery reste le lieu d’art contemporain le plus important pour les artistes de la région jusqu’à la fin des années 1970. En 1971, elle ouvre ses portes dans le nouveau Dalhousie Arts Centre, un bâtiment moderniste conçu par l’architecte haligonien Charles Fowler. Plusieurs personnes influentes se succèdent à la tête de la galerie, dont Bruce Ferguson (1946-2019), Gemey Kelly, Susan Gibson Garvey (née en 1947) et Peter Dykhuis (né en 1956). En 2022, Pamela Edmonds prend la direction de la Dalhousie Art Gallery.
1967 : Africville
Une nuit du printemps 1967 (la date exacte est inconnue), l’église baptiste africaine unie de Seaview est démolie par des ouvriers de la ville de Halifax. Cette action s’inscrit dans le cadre d’une initiative lancée en 1962 pour déplacer les personnes habitant la communauté d’Africville, un établissement colonial noir développé au début des années 1800. Présentée à l’époque comme une opération de « renouveau urbain », la démolition de l’église est reconnue depuis peu comme un acte raciste qui a détruit un héritage culturel unique.
La destruction d’Africville a entraîné la perte d’objets et d’artefacts culturels à haute signification historique et personnelle, dont notamment des œuvres d’art. Au cours de ses recherches en amont de son exposition révolutionnaire de 1998, In This Place: Black Art in Nova Scotia (En ce lieu : l’art noir en Nouvelle-Écosse), le commissaire David Woods (né en 1959) découvre l’histoire de l’artiste Edith Hester McDonald-Brown (1880-1956), native d’Africville. McDonald-Brown est considérée comme la première peintre noire de l’histoire de l’art canadien; elle pourrait s’être rendue à Montréal pour suivre des cours d’art. Highland Cattle (Bovins Highland), 1906, figurant un troupeau de vaches dans un paysage à flanc de colline, est l’une des quatre œuvres de l’artiste conservées à ce jour. Ses autres compositions ont probablement été perdues lors de la relocalisation forcée de la population d’Africville. Le fait que l’œuvre et l’importance de McDonald-Brown soient sous-documentées témoigne du manque généralisé de familiarité entretenue par le public à l’égard de la production artistique de la communauté noire canadienne. Comme l’affirme Woods, « les gens avaient tendance à ignorer qu’il y avait des artistes qui créaient des chefs-d’œuvre équivalents à ceux de n’importe qui d’autre à cette époque ».
Le caractère unique d’Africville a été documenté en 1989, lorsque la MSVU Art Gallery, le Black Cultural Center for Nova Scotia et la Black Genealogical Society ont créé l’exposition Africville: A Spirit that Lives On/Africville : une âme toujours vivante, pour célébrer et reconnaître « l’héritage et l’esprit d’Africville et établir une référence pour des expositions collaboratives communautaires ». En 2019, le Musée d’Africville s’est joint à la MSVU Art Gallery et aux partenaires initiaux pour remonter l’exposition et reconsidérer les enjeux qu’elle soulève.
En 1991, la réalisatrice Shelagh Mackenzie (1937-2006) a produit le court métrage Remember Africville pour l’Office national du film du Canada. Le site est déclaré lieu historique national du Canada en 1996, et décrit comme un « lieu de pèlerinage pour les personnes qui rendent hommage à la lutte contre le racisme ». En 1997, le musicien de jazz torontois Joe Sealy (dont le père est né à Africville) a remporté le prix Juno du meilleur album jazz contemporain pour Africville Suite, dont la pochette est signée par David Woods. Une réplique de l’église baptiste africaine unie de Seaview, qui abrite le Musée d’Africville, se dresse aujourd’hui sur le site.
1969 : Le Nova Scotia College of Art and Design
En 1967, l’artiste Garry Neill Kennedy (1935-2021), âgé de 31 ans, est nommé premier président du Nova Scotia College of Art (aujourd’hui l’Université NSCAD), un changement de titre pour une fonction auparavant désignée comme le rectorat. Kennedy, un Canadien qui avait enseigné aux États-Unis, commence immédiatement à moderniser l’école. Au début de l’année scolaire 1968-1969, il remercie quatre membres du corps professoral contractuel de longue date et engage dix jeunes artistes, pour la plupart originaires des États-Unis, qui s’intéressent davantage aux tendances contemporaines qui marquent le milieu de l’art comme l’art conceptuel, le postminimalisme ou les technologies émergentes, telles que l’art vidéo. Par le recrutement de figures telles que Gerald Ferguson (1937-2009), David Askevold (1940-2008), Patrick Kelly (1939-2011) et Jack Lemon (né en 1936), Kennedy transforme ce qui était jusque-là une petite école conservatrice en une institution de renommée internationale et qui peut légitimement être décrite comme « un foyer d’activité dans les plus récents modes de création artistique ».
Kennedy pilote une initiative de modernisation des installations et des programmes de l’école, qui aboutit à la construction d’une annexe de six étages au bâtiment existant; inaugurée en 1968, l’annexe augmente de plus de trois fois la superficie de l’établissement. Le bâtiment comporte deux galeries d’art : la Mezzanine Gallery et la Anna Leonowens Gallery. En 1969, le terme « design » (abandonné en 1925 par Elizabeth Styring Nutt (1870-1946) alors à la tête de l’institution) est réintroduit dans le nom de l’école, qui obtient la même année le statut d’établissement diplômant. En 1973, l’école lance sa maîtrise en beaux-arts. Le Nova Scotia College of Art and Design (NSCAD) continue de croître en taille et en réputation, alimenté en grande partie par des programmes innovants tels que le cours par projets de David Askevold, l’atelier de lithographie du NSCAD (1969-1976), les NSCAD Press, la programmation d’expositions dans ses deux galeries et le programme actif d’artistes en résidence.
Les cinq programmes conjugués contribuent à créer la brève période de l’âge d’or du NSCAD. Les artistes en résidence jouent un rôle clé dans tous ces programmes, notamment en créant des projets pour le séminaire d’Askevold, dont les résultats sont souvent exposés dans les galeries, mais aussi en enseignant, en supervisant la production d’un livre, en organisant des expositions et, à l’occasion, en réalisant une œuvre pour l’atelier de lithographie. Kennedy laisse délibérément vacants des postes du corps professoral pour être en mesure de payer les artistes en résidence, qui constituent la principale ressource enseignante des programmes d’été de l’école et qui comblent également les manques laissés par les professeur·es en congés sabbatiques, ce qui favorise une mouvance constante dans l’enseignement contribuant à la vitalité des programmes de l’école.
En 1968, l’un des espaces d’exposition de l’école, la Anna Leonowens Gallery, ouvre ses portes avec l’exposition Five Canadians (Cinq Canadiens) organisée par Gerald Ferguson. L’institution inaugure également la même année la Elizabeth Styring Nutt Gallery (plus tard connue simplement sous le nom de « Mezzanine »). Ces galeries ont un programme d’expositions dynamique, accueillant des événements notables tels que la première exposition publique de Dan Graham (1942-2022) et les premières expositions de Gerhard Richter (né en 1932) et d’A. R. Penck (1939-2017) tenues dans une galerie d’art publique en Amérique du Nord. Gerald Ferguson est le premier meneur de ces galeries, avant qu’il ne passe le flambeau à un groupe remarquable de conservateurs et conservatrices, dont Charlotte Townsend-Gault, Ian Murray (né en 1951) et Allan Harding MacKay (né en 1944).
En 1972, l’établissement met sur pied les NSCAD Press, d’abord sous la direction de Kasper König (né en 1943), puis de Benjamin H. D. Buchloh (né en 1941), qui publient de nombreuses monographies d’artistes de renommée internationale, comme Raw Notes de Claes Oldenburg (1929-2022) en 1973, Handbook in Motion de Simone Forti (née en 1935) en 1974 et Complete Writings, 1959-1975 de Donald Judd (1928-1994) en 1975.
L’atelier de lithographie, initialement dirigé par Jack Lemon, permet à des artistes et à des élèves de collaborer avec des maîtres imprimeurs, dont Wallace Brannen (1952-2014) et Bob Rogers (né en 1944), pour créer une série de lithographies originales qui sont vendues pour financer les programmes de l’institution. Au cours de ses sept années d’existence (1969-1976), l’atelier produit des lithographies d’artistes de renom comme Lawrence Weiner (1942-2021), Joyce Wieland (1930-1998), Vito Acconci (1940-2017), Greg Curnoe (1936-1992), Sol LeWitt (1928-2007) et Robert Ryman (1930-2019), parmi beaucoup d’autres.
En 1972, le Nova Scotia College of Art and Design entreprend de s’installer dans des bâtiments historiques vacants du centre-ville de Halifax, un processus qui s’achève en 1978 avec l’ouverture de son nouveau campus sur Duke Street. Ce déménagement permet d’accroître considérablement l’influence de l’institution en plus de sauver un îlot de bâtiments historiques de la destruction pour faire place à un projet d’autoroute à quatre voies.
L’Université NSCAD (ainsi nommée depuis 2003) est toujours indépendante malgré une série de fusions d’universités à Halifax, et demeure l’un des piliers de la communauté artistique haligonienne.
1970 : La conférence de Halifax
La conférence de Halifax est née d’une idée développée par le conservateur indépendant new-yorkais Seth Siegelaub (1941-2013). Cet événement marquant se déroule sur deux jours, du 5 au 6 octobre 1970, et réunit à Halifax un éventail d’artistes parmi les plus célèbres du temps pour un symposium informel sur l’art contemporain. Garry Neill Kennedy (1935-2021) obtient le financement du projet par la compagnie de cigarettes Benson & Hedges, et vingt-cinq artistes reçoivent une invitation pour la conférence de Halifax. La liste des participants est impressionnante et compte notamment Carl Andre, Joseph Beuys, Ronald Bladen, Daniel Buren, John Chamberlain, Gene Davis, Jan Dibbets, Al Held, Robert Irwin, Mario Merz, Robert Morris, Robert Murray, N. E. Thing Co. (IAIN BAXTER& et Ingrid Baxter), Richard Serra, Richard Smith, Robert Smithson, Michael Snow et Lawrence Weiner. L’événement dure deux jours, couronné par la discussion qui a lieu dans une salle fermée au public, mais qui est retransmise dans l’auditorium où toute personne, étudiante, enseignante et du grand public, peut y assister.
Le début de l’événement est marqué par la controverse lorsque Robert Morris, Richard Serra et Robert Smithson décrient la séparation des artistes et des élèves, la jugeant élitiste. Ils n’apprécient pas non plus le projet de l’école de publier les transcriptions et quittent Halifax en signe de protestation. La conférence est également critiquée par un groupe dirigé par Lucy Lippard (née en 1937), protestant contre l’absence de femmes parmi les participants.
L’événement joue un rôle majeur dans la mythologie des « années d’art conceptuel » du Nova Scotia College of Art (aujourd’hui l’Université NSCAD) et attire l’attention du public sur l’institution. Comme le rappelle Kennedy, « la conférence a certainement mis l’école sur la carte internationale de l’art ».
1971 : La Galerie d’art de l’Université St. Mary’s et la MSVU Art Gallery
Les universités St. Mary’s et Mount Saint Vincent fondent toutes deux des galeries d’art en 1971. Elles s’ajoutent à la Dalhousie Art Gallery en tant qu’espaces d’exposition majeurs et de collection d’œuvres réalisées par des artistes de Halifax. Elles accueillent également des expositions de tout le Canada, ce qui met en contact les artistes de la ville avec les tendances contemporaines.
Les galeries d’art universitaires jouent un rôle important dans le développement de la pratique curatoriale haligonienne, avec des programmes tels que le poste d’agent·e des expositions lancé par Mary Sparling, directrice de la MSVU Art Gallery, qui se veut un apprentissage d’un an en pratiques curatoriales visant à acquérir une expérience rare dans les galeries d’art.
Au cours des années 1990, les deux galeries jouent également un rôle déterminant dans l’élaboration d’une programmation qui mise sur le travail d’artistes établi·es et émergent·es de Halifax. À la Galerie d’art de l’Université St. Mary’s, Leighton Davis (né en 1941) et Gordon Laurin (né en 1961) élaborent des programmes comprenant des expositions collectives de la relève ainsi que des expositions individuelles de figures artistiques locales et régionales réputées. La MSVU Art Gallery met l’accent sur l’art créé par les femmes et, sous la direction de Sparling et, plus tard, d’Ingrid Jenkner (née en 1955), la galerie organise de nombreuses expositions individuelles de créatrices haligoniennes telles que Nancy Edell (1942-2005), Kelly Mark (née en 1967) et Amanda Schoppel (née en 1974), pour n’en citer que quelques-unes. Au cours des années 2000, la Galerie d’art de l’Université St. Mary’s, sous la direction de Robin Metcalfe, contribue à diffuser et à faire connaître les métiers d’art, de même qu’à promouvoir la carrière et la pratique d’artistes LGBTQI+. Metcalfe prend sa retraite en 2021.
1974 : Eyelevel et les centres d’artistes autogérés haligoniens
Malgré le nombre de galeries d’art publiques dans la ville, plusieurs artistes estiment que les occasions d’exposition sont rares, ce qui conduit à la fondation, en 1974, de la Eye Level Gallery Society (aujourd’hui Eyelevel) et de l’Atlantic Filmmakers Cooperative. Le Centre for Art Tapes suit en 1979.
Eyelevel est l’un des plus anciens centres d’artistes autogérés du Canada, et depuis longtemps, il exerce une influence considérable en tant que laboratoire d’art contemporain à Halifax. Créé par des artistes associé·es au Nova Scotia College of Art and Design (aujourd’hui l’Université NSCAD), Eyelevel garde un lien étroit avec le corps professoral du collège dont beaucoup de membres participent activement à ses conseils d’administration et comités. Deux autres centres d’artistes autogérés voient le jour à Halifax : la OO Gallery, brièvement en activité au début des années 1990, et le Khyber Centre for the Arts, créé en 1995.
Le Khyber, en particulier, sert de centre pour les jeunes artistes en raison de son statut marginal (dans les premières années, il ne reçoit aucun financement public) et de son modèle commercial peu orthodoxe : il est financé par l’exploitation d’un bar et par la tenue d’événements musicaux. Au milieu des années 1990, le Khyber joue un rôle central sur la scène musicale haligonienne, quand Halifax a brièvement joui de la réputation d’être la « nouvelle Seattle », et que des artistes du milieu musical, comme Sarah MacLachlan, Sloan, Jale et Thrush Hermit, ont pris de l’importance.
Le dernier venu dans le monde des centres d’artistes autogérés, qui ouvre ses portes en 2021, est le Blue Building, galerie fondée et dirigée par l’artiste de Halifax, Emily Falencki (née en 1972). Son modèle novateur repose sur un noyau d’artistes principal et des expositions collectives commissariées.
1975 : Le Musée des beaux-arts de la Nouvelle-Écosse
Le plus grand musée d’art de Halifax est le Musée des beaux-arts de la Nouvelle-Écosse (MBANE). Paradoxalement, c’est aussi l’une des plus jeunes institutions de la province. Bien que ses origines remontent à la fondation de la Galerie d’art de la Nouvelle-Écosse en 1908, c’est en 1975 que le musée ouvre ses portes au public pour la première fois sous le nom de Musée des beaux-arts de la Nouvelle-Écosse, occupant les espaces d’exposition nouvellement libérés du Nova Scotia College of Art and Design (aujourd’hui l’Université NSCAD) après son déménagement au centre-ville.
La première exposition organisée sur le nouveau site est une rétrospective de l’œuvre de LeRoy Zwicker (1906-1987), l’un des principaux instigateurs de la création d’une galerie d’art publique à Halifax. (LeRoy est le principal donateur, avec sa femme Marguerite, de la campagne de financement qui aboutit à l’ouverture du premier bâtiment permanent du musée en 1988).
En 1978, le MBANE occupe la majeure partie des anciens locaux du NSCAD, que l’école d’art avait vendus à l’Université Dalhousie pour l’aider à financer son déménagement au centre-ville. Comme le collège avant lui, le MBANE ne trouve pas cet espace assez vaste pour répondre à ses besoins; presque immédiatement, son conservateur et directeur fondateur, Bernard Riordon (né en 1947), entreprend des recherches pour trouver un lieu permanent pour l’institution. L’acquisition par la province, en 1984, de la maison peinte et délabrée de Maud Lewis (1901-1970) est l’élément déclencheur dans la conception d’un nouvel espace pour le musée sur le front de mer de Halifax. Le bâtiment proposé présenterait la maison restaurée de Maud Lewis comme une attraction centrale et un point d’intérêt pour les touristes.
Malheureusement, le terrain situé au bord de l’eau est vendu à un promoteur privé, et un bâtiment historique abandonné, le Dominion Building, situé en face d’un édifice provincial, est cédé au musée. Le nouveau Musée des beaux-arts de la Nouvelle-Écosse ouvre ses portes au public en 1988 – ironiquement, dans un bâtiment trop petit pour accueillir la maison de Maud Lewis. En 1997, dans le cadre de la deuxième phase d’agrandissement, le musée acquiert deux étages et une partie du sous-sol d’un bâtiment adjacent, le Provincial Building, qui abrite des bureaux du gouvernement provincial; l’agrandissement est inauguré en 1998. La Galerie Maud Lewis Banque Scotia, soutenue par la Banque de Nouvelle-Écosse et la Craig Foundation, fournit un espace d’exposition permanent pour la maison de la peintre populaire et l’exposition de ses œuvres.
Connu dans les années 1980 et 1990 comme un musée relativement conservateur axé sur l’art populaire, le MBANE commence à changer d’orientation à la fin des années 1990 avec l’embauche de deux contractuels : Peter Dykhuis (né en 1956) (envoyé par la Anna Leonowens Gallery du NSCAD), en tant que conservateur de l’art contemporain, et John Murchie (né en 1943), en tant que conservateur associé. En 2001, le musée ouvre ses galeries d’art des Premières Nations et d’art inuit, sous la direction de Jim Logan (né en 1955). Les plans pour la construction d’une galerie satellite à Yarmouth commencent en 1999, et celle-ci ouvre officiellement ses portes en 2006. En 2001, je suis engagé comme premier conservateur en art contemporain permanent du musée. C’est également cette année-là que la famille Sobey propose au MBANE d’organiser un prix biennal pour l’art canadien. Financé par la Fondation Sobey pour les arts, le Prix Sobey pour les arts devient rapidement le prix artistique le plus convoité au Canada. Les expositions biennales (puis annuelles à partir de 2006) permettent au MBANE de se concentrer davantage sur l’art contemporain, tout en maintenant un programme diversifié d’expositions historiques, d’art populaire et de métiers d’art.
Le directeur du MBANE, Riordon, quitte son poste en 2002 pour prendre la direction de la Galerie d’art Beaverbrook (aujourd’hui le Musée des beaux-arts Beaverbrook) à Fredericton, au Nouveau-Brunswick. Il est remplacé par Jeffrey Spalding (1951-2019), qui a été conservateur contractuel à la Centennial Art Gallery. Pendant son mandat au MBANE, Spalding s’attache à développer la collection permanente du musée, qui s’enrichit de plusieurs milliers d’objets. Il poursuit également les efforts de l’institution pour atteindre les diverses communautés de la province en engageant David Woods (né en 1959) dans le cadre d’une initiative éphémère visant à faire découvrir l’art africain de Nouvelle-Écosse. Le programme ne survit pas au départ de Spalding en 2007, qui part diriger le Glenbow Museum à Calgary.
En 2019, la province de la Nouvelle-Écosse annonce son intention de construire un nouveau bâtiment pour le MBANE sur un terrain vacant situé à côté du site proposé en 1984. En 2020, une équipe d’architectes obtient le contrat pour la conception du bâtiment : les firmes d’architectes KPMB et Omar Gandhi, le studio de Jordan Bennett, l’aînée mi’kmaw Lorraine Whitman, Public Work et Transsolar.
1976 : Folk Art of Nova Scotia (L’art populaire de la Nouvelle-Écosse)
La première exposition itinérante organisée par le Musée des beaux-arts de la Nouvelle-Écosse (MBANE), Folk Art of Nova Scotia (L’art populaire de la Nouvelle-Écosse), est inaugurée en 1976 avant de circuler en 1977 et 1978. Elle présente les œuvres de trente-deux artistes ainsi que des exemplaires d’œuvres anonymes. Bien que la majorité des artistes vivent et travaillent dans les régions rurales de la Nouvelle-Écosse, l’exposition a un impact considérable à Halifax. Son succès — elle permet au monde de l’art canadien de découvrir Maud Lewis (1901-1970), Joseph (Joe) Norris (1924-1996) et Collins Eisenhauer (1898-1979), parmi d’autres artistes populaires qui rencontrent ensuite la célébrité — ouvre la voie au MBANE dans la promotion (certaines personnes ont affirmé que « création » serait plus juste) de l’art et des artistes populaires de la Nouvelle-Écosse, presque à l’exclusion d’œuvres plus contemporaines. L’intérêt du musée pour l’art populaire est stratégique, car la tendance se révèle indubitablement néo-écossaise, sans compter qu’elle peut être commercialisée, tant sur le plan intérieur qu’à l’étranger, pour aider le MBANE à concrétiser son projet d’un bâtiment permanent pouvant l’abriter.
Les artistes de Folk Art of Nova Scotia se ressemblent en ce sens que la plupart sont des personnes âgées, peu éduquées et essentiellement issues du milieu rural. Peu de ces artistes ont étudié au-delà de l’école primaire et l’ensemble a besogné dur sa vie durant, occupant des emplois de la classe ouvrière. Ces artistes créent leur art sans attendre la gloire ou le profit, et travaillent dans un isolement et une obscurité relative, sans savoir que d’autres créent des œuvres similaires aux leurs. Cette exposition est montée à point nommé : sur les dix-sept artistes vivant·es qui y figurent, seulement cinq le sont toujours en 1982, et d’autres ont cessé de travailler pour des raisons de santé. Mais l’intérêt national et international pour l’art populaire ne cesse de croître. Le MBANE organise plusieurs autres expositions itinérantes, dont des expositions individuelles majeures de Joe Norris et, peut-être la plus célèbre, de Maud Lewis. Tendance inconnue en 1976, l’art populaire de la Nouvelle-Écosse devient l’exportation artistique la plus célèbre de la province, un phénomène essentiellement rural commercialisé et diffusé depuis Halifax.
L’exposition de 1976 marque profondément le musée de surcroît. Malgré un programme d’exposition actif d’artistes de renom de la province et des expositions collectives rassemblant des artistes de la relève, on a souvent l’impression que le MBANE se concentre principalement sur l’art populaire. Ce n’est qu’en 2001 que l’institution engage son premier conservateur permanent d’art contemporain.
1986 : « Halifax Sculpture »
Du milieu des années 1980 jusqu’au début des années 2000, la sculpture est l’un des secteurs les plus dynamiques de la culture visuelle à Halifax. Ce phénomène est alimenté par une génération d’artistes issue du Nova Scotia College of Art and Design (aujourd’hui l’Université NSCAD), qui s’inscrit dans une tendance internationale de retour à la figuration dans la sculpture contemporaine, et qui évolue sous la direction partielle de deux artistes chevronnés liés au collège, John Greer (né en 1944) et Robin Peck (né en 1950).
L’exposition personnelle de Greer à la Dalhousie Art Gallery en 1987, Connected Works (Œuvres connectées), marque une nouvelle approche postminimaliste de la sculpture dans la ville, une manière de fabriquer des objets qui s’appuie autant sur les idées de l’art conceptuel que sur une nouvelle importance accordée aux matériaux et aux techniques traditionnelles, telles que le modelage, la sculpture et le moulage. D’autres artistes suivent, comme Glen MacKinnon (né en 1950), qui réalise de grands objets sculptés en contreplaqué, et Thierry Delva (né en 1955), qui sculpte dans la pierre et qui suit une formation de tailleur de pierre, afin de perfectionner ses compétences techniques à la suite de l’obtention de son diplôme du NSCAD. L’exposition Critical Mass (Masse critique), organisée en 1991 à la MSVU Art Gallery, présente une nouvelle génération d’artistes de la sculpture comme que Greg Forrest (né en 1965), Iris Seyler (née en 1965) et Philip Grauer (né en 19 650, qui exposent ensuite régulièrement tout au long de la décennie. Comme l’observe un conservateur à l’époque, « la sculpture contemporaine s’impose dans les années 1990 en Nouvelle-Écosse comme une pratique artistique d’une vigueur remarquable ».
De nombreuses expositions dans des galeries publiques et universitaires au cours de cette période attestent de cette vitalité, mais pas autant que ces deux initiatives menées par des artistes : The Shed Show (L’exposition du hangar) en 1993 et Sculpture Expo ’94: The Mall Show (Sculpture Expo ’94 : l’exposition du centre commercial) en 1994. Ces deux expositions font suite à une série d’expositions de sculptures en plein air sur la pelouse de l’Université technique de Nouvelle-Écosse, qui débute à la fin des années 1980 et se poursuit jusqu’au début des années 1990. Les deux expositions se tiennent dans des espaces peu utilisés à Halifax (l’ancien hangar de l’immigration du Quai 21 et un centre commercial en difficulté sur le chemin Spring Garden) et sont organisées par de jeunes artistes en sculpture.
The Shed Show présente six artistes : Shelley Dougherty (1969-2011), Philip Grauer, Bruce MacLean, Lauren Schaffer (née en 1968), Iris Seyler et Mark Whidden (né en 1962). L’exposition fait l’objet d’un article de fond par Robin Peck dans C Magazine, et une œuvre de Schaffer est reproduite en couverture. Trois des artistes du Shed Show participent également à Sculpture Expo ‘94: The Mall Show, organisée par Grauer. Cette exposition compte les œuvres de dix-neuf artistes sculpteurs et sculptrices de renom ou qui émergent (dont Peck et Greer), et donne un aperçu de la scène haligonienne naissante du mouvement « Halifax Sculpture ».
L’importance de la sculpture dans la ville est reconnue en 1995 avec l’exposition Object Lessons: Eight Nova Scotia Sculptors (Leçons d’objets : huit artistes de la sculpture de Nouvelle-Écosse), une exposition du Musée des beaux-arts de la Nouvelle-Écosse (MBANE) consacrée à la sculpture néo-écossaise contemporaine. Comme l’écrit le commissaire Robin Metcalfe, « la première moitié des années 1990 voit un flux constant de solides jeunes artistes de la sculpture sortir du Nova Scotia College of Art and Design (NSCAD), tandis qu’un groupe plus âgé associé au collège a acquis une reconnaissance nationale et internationale ». L’exposition est répartie équitablement entre quatre artistes représentant la tradition de la sculpture au NSCAD — Thierry Delva, Greg Forrest, Kelly Mark et Philip Grauer — et quatre artistes reflétant des idées différentes, plus traditionnelles, sur la pratique sculpturale. Les sculpteurs et sculptrices du NSCAD sont diplômé·es de l’école, plusieurs y enseignent et connaissent un succès notable dans les années qui suivent (y compris le succès de Grauer en tant que galeriste — à ce jour, il dirige toujours la galerie commerciale Canada à New York).
La sculpture haligonienne est introduite à Toronto en 1996, lorsque Kenneth Hayes organise l’exposition 1:1 Recent Halifax Sculpture (1:1 Sculpture récente de Halifax) pour la S. L. Simpson Gallery de Toronto. L’événement réunit les œuvres de Delva, de Grauer et d’une jeune artiste de Halifax, Lucy Pullen (née en 1971). Sa pièce Sucker (Dupe) 1996, une figure moulée en bonbon dur, dont le titre pourrait aussi se traduire en français par « suçon », est l’un des rares exemples d’autoportrait grandeur nature réalisé par une sculptrice canadienne. Un autre exemple tient dans l’œuvre de perlage Skin (Peau), 2003-2012, de Sarah Maloney (née en 1965).
Dirigé par des artistes, le mouvement « Halifax Sculpture » est rapidement accepté par le monde de l’art institutionnel de la ville et d’ailleurs. John Greer poursuit sa carrière sur la scène internationale depuis son atelier de Pietrasanta, en Italie. Les deux premières personnes finalistes de l’Atlantique au Prix Sobey pour les arts sont Colleen Wolstenholme (née en 1963) et Greg Forrest. Les sculptures en plâtre à l’effigie de comprimés de médicament de Wolstenholme sont exposées dans tout le Canada, puis sont finalement acquises par le MBANE, tandis que le grand bronze de Forrest, Anything Less is a Compromise (Moins que cela n’est qu’un compromis), 2004, est inclus dans l’exposition en tournée nationale, Arena: The Art of Hockey (Aréna : l’art du hockey). L’œuvre de Thierry Delva fait l’objet d’une exposition itinérante nationale en circulation de 2004 à 2005 et ses emblématiques Box Works (Séries de boîtes) sont acquises par le Musée des beaux-arts du Canada (MBAC).
Tout compte fait, l’élan ne dure pas. Les années 1990 et le début des années 2000 constituent peut-être l’âge d’or de la sculpture haligonienne, mais la plupart des artistes qui la pratiquaient ont depuis quitté la ville (plusieurs pour enseigner dans des écoles d’art à travers le pays) et plusieurs ont cessé de faire de l’art, bien qu’une poignée continue à travailler à Halifax. Néanmoins, la « vigueur remarquable » de la sculpture à Halifax, à cheval entre les années 1990 et 2000, marque les esprits, tant à l’échelle locale que nationale, car les artistes de la sculpture de Halifax ont contribué à changer la façon dont cette pratique est perçue dans l’art canadien.
2001 : Prix Sobey pour les arts
À l’automne 2001, le nouveau conservateur d’art contemporain au Musée des beaux-arts de la Nouvelle-Écosse (MBANE) est soudainement appelé dans la salle de conférence de l’institution, où l’attendent son directeur, Bernard Riordon (né en 1947), de même que Pierre Théberge (1942-2018), alors directeur du Musée des beaux-arts du Canada (MBAC), et deux personnes de la Fondation Sobey pour les arts : Donald R. Sobey (1934-2021) et sa nièce, Heather Sobey-Connors. Théberge précise rapidement l’objectif de la réunion. Sobey, alors président du conseil d’administration du MBAC, souhaite créer un prix national d’art pour les jeunes artistes, un prix qui mettrait en vedette des artistes de toutes les régions du Canada et qui serait assorti d’une importante somme de 50 000 dollars. Le MBANE pourrait-il s’occuper d’un tel projet?
Ce conservateur nouvellement nommé est votre humble auteur. Théberge explique que Sobey a présenté l’idée au MBAC, mais comme l’approche régionale du prix, selon lui, ne relève pas du mandat du musée, il a suggéré que l’idée soit soumise au MBANE. Serait-il possible de développer un modèle de prix, ont-ils demandé, qui serait décerné par des conservatrices et conservateurs d’art contemporain et qui aurait une portée véritablement nationale? J’ai répondu par l’affirmative et j’ai commencé la planification. Le prix, qui sera décerné tous les deux ans, est lancé à l’automne 2002. Le modèle que j’ai élaboré reste plus ou moins en place à ce jour : cinq conservateurs ou conservatrices de cinq régions du Canada (l’Atlantique, le Québec, l’Ontario, les Prairies et le Nord, ainsi que la Côte Ouest), évaluent une liste longue de cinq artistes de chaque région et une liste courte d’une personne candidate choisie dans chacune d’elles. La personne lauréate est sélectionnée par le même jury. Au départ, les membres du jury devaient tous et toutes être des conservateurs ou conservatrices d’institutions avec collection, mais ce critère s’est élargi au fil du temps en raison de la nécessité de diversifier la composition du jury.
La première exposition du Prix Sobey pour les arts, organisée au MBANE, présente Brian Jungen (né en 1970), David Hoffos (né en 1966), Marla Hlady (née en 1965), Jean-Pierre Gauthier (né en 1965) et Colleen Wolstenholme (née en 1963). Jungen est choisi comme lauréat par un jury composé de Pierre Landry du Musée d’art contemporain de Montréal (MAC), de Jessica Bradley du Musée des beaux-arts de l’Ontario, de James Patten du Musée des beaux-arts de Winnipeg, de Bruce Grenville du Musée des beaux-arts de Vancouver et de moi-même, représentant du Musée des beaux-arts de la Nouvelle-Écosse. À l’époque, je suis également président, et le prix est d’abord administré par l’artiste islandaise canadienne, Svava Thordis Juliusson (née en 1966), aujourd’hui établie à Hamilton, en Ontario, puis par l’artiste néo-écossaise Eleanor King (née en 1979), qui vit aujourd’hui à New York. Lorsque je deviens directeur intérimaire du MBANE, Sarah Fillmore, alors conservatrice principale du MBANE, devient présidente du jury, un rôle qu’elle assume jusqu’en 2015.
L’exposition de 2004 (remportée par Jean-Pierre Gauthier) fait le tour du Canada jusqu’en 2006. Cette année-là, il est décidé de faire du prix un événement annuel et de l’organiser à Halifax et dans une autre ville canadienne, en alternance. L’exposition de 2006 se tient à Montréal, où le prix est décerné à Annie Pootoogook (1969-2016).
Le Prix Sobey pour les arts devient rapidement le prix d’art contemporain le plus connu au Canada. Cet honneur, sans parler d’un prix en espèces considérable, qui récompense des artistes d’importance dans tout le pays, jette une lumière sans pareille sur la relève artistique de Halifax, qui bénéficie des expositions organisées dans sa ville tous les deux ans, ainsi que des visites annuelles du comité de conservation. Plusieurs jeunes artistes, non seulement à Halifax, mais dans toute la région, attirent l’attention de galeristes et de conservateurs et conservatrices qui n’auraient peut-être jamais vu leurs œuvres si ce n’était de la liste de sélection annuelle du prix, qui en est venu à être connu simplement sous le nom de « Sobey ».
De 2002 à 2015, le Sobey fait de Halifax l’un des centres de l’art contemporain au Canada. Après mon départ du MBANE en 2015, le prix a été transféré au Musée des beaux-arts du Canada en 2016, où il se trouve encore aujourd’hui. En 2018, la Fondation Sobey pour les arts a augmenté la valeur du prix à 100 000 dollars tout en ajoutant des prix de 20 000 dollars pour chaque artiste de la liste courte et de 2 000 dollars les vingt autres artistes de la liste longue.