Maud Lewis (1901-1970)
L’artiste néo-écossaise la plus connue aujourd’hui est sans doute Maud Lewis. Sa notoriété croissante continue d’avoir un impact sur la ville qu’elle n’a pourtant visitée qu’une seule fois dans sa vie : « Halifax, c’est le plus loin que je suis allée, et c’était il y a longtemps, avant que je ne me marie », confie-t-elle dans le cadre d’un entretien télévisé en 1965. Elle passe toute sa vie dans le même coin de la Nouvelle-Écosse, entre les villes de Yarmouth et Digby. Sa maison peinte, déplacée de son emplacement d’origine à Marshalltown et désormais installée de façon permanente au Musée des beaux-arts de la Nouvelle-Écosse, attire chaque année des milliers de visites à Halifax, et la légende qui s’est développée depuis sa mort, celle d’une persévérance joyeuse malgré les difficultés physiques et économiques, résonne auprès des touristes du monde entier.
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Maud Lewis, La maison peinte de Maud Lewis, vers les années 1920
Techniques mixtes, 4,1 x 4,1 x 3,8 m
Musée des beaux-arts de la Nouvelle-Écosse, Halifax -
Maud Lewis, Deer in Winter (Cerfs en hiver), v.1950
Huile sur carton, 29,6 x 35,9 cm
Musée des beaux-arts de la Nouvelle-Écosse, Halifax -
Maud Lewis, Oxen in Spring [Two Oxen with Yoke] (Bœufs au printemps [Deux bœufs avec joug]), v.1960
Huile sur carton, 30,2 x 35,5 cm
Collection privée, Nouvelle-Écosse
La préservation et l’exposition de la maison peinte emblématique de Maud Lewis incite la province à trouver un lieu d’accueil permanent pour le Musée des beaux-arts de la Nouvelle-Écosse au milieu des années 1980, quatre-vingts ans après que la Galerie d’art de la Nouvelle-Écosse (GANE) ne soit fondée dans le but de créer musée d’art. Après avoir ignoré depuis le dix-neuvième siècle les arguments de Forshaw Day (1831-1903), d’Anna Leonowens (1831-1915), d’Arthur Lismer (1885-1969) et de nombreux autres artistes et notables de Halifax sur l’importance d’un musée d’art pour la ville, les autorités provinciales et municipales se laissent finalement convaincre par l’histoire inspirante de Maud Lewis. Ironie du sort, le bâtiment qu’on attribue au musée est trop petit pour accueillir la maison de Maud Lewis, et ce n’est qu’à la suite d’un agrandissement, en 1998, que la maison peut enfin être vue par le public.
De son vivant, Lewis est encensée par la presse locale et nationale, mais sa réputation repose, pour l’essentiel, sur les personnes qui ont visité sa maison de Marshalltown. Jamais de son vivant ses œuvres ne feront l’objet d’une exposition muséale ou ne seront collectionnées par des galeries d’art ou des musées. Pourtant, en visitant Halifax aujourd’hui, on ne peut échapper aux panneaux et aux affiches qui présentent son œuvre, et ses images sont partout, sur les t-shirts, les tasses, les fourre-tout, les calendriers et autres babioles que rapportent les touristes. Les gens se déplacent pour visiter sa maison comme s’ils faisaient un pèlerinage; et la maison, ainsi que l’exposition de peintures et d’objets dans la galerie qui porte son nom, renforcent l’histoire romantique de Maud Lewis. L’artiste en est venue à incarner l’art populaire néo-écossais, laissant une marque indélébile sur l’histoire de l’art haligonienne, même si c’était à partir de sa petite maison au bord de la route, dans le comté de Digby.