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Les survivants ne sont pas des héros 1967

Les survivants ne sont pas des héros

Sorel Etrog, Survivors Are Not Heroes (Les survivants ne sont pas des héros), 1967

3 exemplaires, bronze, 548,6 cm

Hart House, Université de Toronto

Sorel Etrog avait exploré le thème de la guerre dans Commémoration de la guerre II, 1960-1961, mais dans Les survivants ne sont pas des héros, il traite pour la première fois de la tradition des monuments aux morts de la guerre. Au Canada, comme ailleurs en Amérique et en Europe, les monuments aux morts sont omniprésents après la Première Guerre mondiale. Les collectivités commandent des sculptures pour commémorer leurs soldats tombés au combat. Une chercheure qualifie de « frénétique » la construction de monuments commémoratifs au Canada. Dans la plupart des cas, ces monuments décrivent les soldats tombés au combat de manière réaliste ou avec des personnages symboliques afin de créer une allégorie de la victoire ou de la bravoure.

 

Walter S. Allward, Mémorial national du Canada à Vimy, 1922-1936
Walter S. Allward, Mémorial national du Canada à Vimy, 1922-1936, calcaire de Seget, 40 x 75 m, Lieu historique national du Canada Crête-de-Vimy, Givenchy-en-Gohelle, France, Gouvernement du Canada.

Dans Les survivants, Etrog, à la fois victime et survivant des attaques nazies et de l’occupation soviétique de sa Roumanie natale, crée une œuvre qui va à l’encontre de sa tradition de sculptures monumentales publiques. Il ne reproduit pas le message héroïque habituel, mais crée plutôt une œuvre hétérogène et abstraite sur le plan stylistique. L’œuvre à grande échelle est puissante, mais elle n’est pas axée sur la célébration.

 

La sculpture appartient à une tradition artistique qui représente la souffrance des innocents et les horreurs de la guerre, comme on les voit par exemple dans Guernica, 1937, de Pablo Picasso (1881-1973) (qui a inspiré Etrog dans une autre œuvre) ou dans The Destroyed City (La Ville détruite), 1947-1951, par Ossip Zadkine (1890-1967). Le titre de l’œuvre d’Etrog révèle l’intention de l’artiste; Les survivants ne sont pas des héros ne commémore pas les soldats tombés au combat, mais parle plutôt de ceux qui ont vécu la guerre. Le style et la composition de l’œuvre d’Etrog offrent une métaphore des émotions complexes qui résultent des expériences traumatisantes des survivants de la guerre, des sentiments qui incluent souvent la culpabilité et la honte de même que le chagrin et la colère, à l’opposé des associations héroïques de la victoire.

 

Sur le plan de la structure, Les survivants se compose de quatre couches très distinctes liées par une relation de tension et de contraste. Dans le bas se trouve le motif de la « roue du soleil », qui apparaît également dans Commémoration de la guerre II, 1960-1961, Souimanga II, 1962-1964, et Sun Life, 1984, et qui crée l’« illusion d’optique que… [la sculpture est] équilibrée et tient debout seule, indépendamment de la base ». Au sommet de ce grand élément circulaire et émergeant de celui-ci, un réseau de maillons s’entrelace, se maintenant mutuellement en place tout en procurant une sensation de mouvement et d’énergie. Au-dessus se trouve une forme rectangulaire horizontale, une forme géométrique saisissante qui contraste avec les motifs arrondis dans la partie inférieure. La sculpture culmine en un grand élément vertical qui occupe environ la moitié de l’œuvre et attire les yeux du spectateur vers le haut, suggérant l’espoir.

 

Mesurant plus de cinq mètres, Les survivants ne sont pas des héros est l’une des plus grandes sculptures en bronze créées par Etrog. C’est un symbole de Toronto tant par son emplacement au centre-ville, sur le campus St. George de l’Université de Toronto, que pour son inclusion dans l’importante exposition Sculpture ’67, qui s’est déroulée au Nathan Phillips Square devant l’hôtel de ville dans le cadre des célébrations du centenaire du Canada
 

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